S893 - L’impact physiologique du port d’un masque protecteur antiviral pendant l’entraînement dépend de l’intensité de l’exercice

Comme l’indique une autre fiche savoir-sport (Fiche S892: http://www.insquebec.org/formation/savoir-sport/?requestedFiche=S892) , dès lors que le port d’un masque protecteur antiviral est recommandé ou obligatoire pour réduire le risque d’infection, on peut se demander quels en sont les impacts physiologiques pendant l’effort, par exemple pendant des périodes d’exercice physique d’intensité élevée. En effet, l’adaptation du corps à la limitation du flux d’air lors du port du masque facial se fait principalement via la stimulation compensatoire de certains éléments (ex. : la fréquence respiratoire). Mais lors d’efforts maximaux prolongés ou répétés, la fonction respiratoire est déjà fortement sollicitée, ce qui pourrait limiter les compensations.

Jusqu’en juin 2020, aucune équipe de recherche n’avait mesuré l’effet du port d’un masque à des intensités maximales (proches du VO2max). Mais en juillet 2020, Fikenzer et coll. ont tenté de combler ce vide en appréciant, pendant un test incrémental jusqu’à épuisement, la fonction cardiopulmonaire d’individus sains portant un masque chirurgical ou un masque de type FFP2/N95.

Il en ressort qu’à intensité maximale, la ventilation et la performance sont réduites par le masque chirurgical ( 8,8 % et 4,5 %, respectivement), et sont fortement altérées par le masque FFP2/N95 ( 12,6 % et 13,1 %, respectivement). Il en est de même pour l’inconfort général qui augmente de 2,4 points sur 10 avec le masque chirurgical, et de 4,2 points avec le masque FFP2/N95. Ces résultats sont donc d’un grand intérêt, car ils montrent que sur le plan respiratoire, il n’est pas possible de compenser totalement la limitation du flux d’air si l’intensité est élevée.

Il reste à savoir si l’on arriverait aux mêmes conclusions avec des athlètes. Par ailleurs, l’étude de Fikenzer et coll. ne rend pas compte des variations de la fonction cardiopulmonaire à chaque étape du test, par exemple en ce qui a trait à la saturation en O2 (mais de nombreux physiologistes soutiennent qu’un revêtement facial approprié n’affectera pas l’oxygénation du sang davantage que ne le fait l’exercice lui-même). Cette étude n’indique pas non plus s’il y a des risques de santé associés à l’effort d’intensité élevée avec port d’un masque.

Bref, pendant des activités aérobies d’intensité élevée avec masque, le sujet sain ne compense pas parfaitement la restriction au passage de l’air, d’où une performance réduite à intensité maximale aérobie, et on ne sait pas si ce type de limitation présente des risques pour la santé.

Soulignons que pour être « approprié », un revêtement ou au masque facial doit être perméable aux gaz tout en restreignant le passage des gouttelettes. Le défi est de trouver ou de concevoir des masques et revêtements faciaux les plus confortables possible.

Il faudra par ailleurs mener d’autres études pour : 1) déterminer le pourcentage de la puissance maximale aérobie où le corps n’est plus capable de compenser; 2) vérifier si l’incapacité de compenser s’accompagne de risques pour la santé; 3) trouver comment l’impact du port d’un masque varie selon le niveau de performance des sujets.

Source primaire

Fikenzer S et coll. (2020) Effects of Surgical and FFP2/N95 Face Masks on Cardiopulmonary Exercise Capacity. Clinical Research in Cardiology: Official Journal of the German Cardiac Society
https://doi.org/10.1007/s00392-020-01704-y

Rédacteur

Evelyne Dubé, M. Sc., INS Québec

Éditeur

François Bieuzen, Ph.D., physiologiste de l’exercice, INS Québec

Mots-clés

charge d’entraînement, Coronavirus, COVID-19, Masque protecteur, Pandémie

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Charbonneau-Rousseau S. (2018) Contraintes physiologiques associées au port d’un appareil de protection respiratoire de type P100 selon l’intensité physique et la température ambiante. Mémoire de maîtrise, UQAM.

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