S888 - Est-ce que modérer la charge d’entraînement améliore la fonction immunitaire?

Dès le début du confinement obligatoire face à la pandémie de la COVID-19, il a été souvent été question des risques d’infection ou de complications associées à un entraînement intensif (voir quelques-uns des articles sur ce sujet parus en mars 2020 : section Références, plus bas). On avance notamment l’idée qu’il faut réduire l’intensité de l’entraînement afin d’améliorer la fonction immunitaire.

Mais comme le fait ressortir cet article de N. P. Walsh, ce qui est indiqué, c’est plutôt d’éviter d’augmenter brusquement la charge d’entraînement (surtout la durée des séances, mais aussi leur intensité) pour éviter que la fonction immunitaire ne soit réduite.

Pendant la période qui suit un effort intense d’une durée plus élevée que celle à laquelle l’athlète est habitué, à la fois la fonction immunitaire innée et la fonction immunitaire acquise diminuent souvent de façon transitoire (diminution de l’ordre de 15 à 70 %), d’où l’idée mise de l’avant à la fin des années 1980 que l’on serait plus à risque d’infection pendant les premières minutes suivant un séance d’entraînement.

Il est possible que les athlètes d’élite profitent d’une réponse immunitaire plus efficace contre les virus respiratoires; mais cela reste spéculatif. Autre possibilité : les athlètes de niveau international évitent plus facilement les infections grâce à leur style de vie : davantage de comportements préventifs, meilleure hygiène, alimentation, sommeil et gestion du stress gestion grâce à leur expérience et une meilleure éducation.

Chose certaine, l’entraînement excessif et le surentraînement sont associés à une moins bonne fonction immunitaire.

Néanmoins, des travaux récents indiquent que les athlètes de haut niveau sont plus à risque de symptômes d’infection des voies respiratoires supérieures (allant du nez au larynx) lors d’un entraînement intensif, particulièrement en hiver et face à une augmentation marquée de la charge d’entraînement.

N. P. Walsh recommande aux entraîneurs de se conformer aux recommandations suivantes, inspirées de celles du Exercice Immunology Society position statement de 2011. À noter que dans une publication scientifique plus récente (Simpson et coll., 2020) où N. P. Walsh est l’un des huit auteurs (faisant également l’objet d’une fiche savoir-sport), les observations et conclusions diffèrent sensiblement sur certains points, d’où l’intérêt pour les entraîneurs de prendre connaissance des deux fiches.

Recommandations en matière de planification de l’entraînement et de la récupération afin de maintenir la santé immunitaire des athlètes

1. Moduler la charge d’entraînement en jouant sur le volume et l’intensité;
2. Éviter toute augmentation du volume ou de l’intensité supérieure à 5 à 10 % par semaine, particulièrement pendant l’hiver;
3. Miser sur de fréquentes séances d’entraînement courtes et intenses plutôt que sur des séances longues;
4. Mettre en œuvre des activités de récupération immédiatement après les séances d’entraînement de degré élevé de difficulté;
5. Prévoir des séances d’entraînement faciles ou moyennement difficiles après chaque séance de degré élevé de difficulté;
6. Planifier une semaine de récupération (degré de difficulté moins élevé) après chaque période de deux ou trois semaines d’entraînement de degré élevé de difficulté;
7. Permettre aux athlètes à risque accru de maladie de prendre plusieurs semaines de récupération active après une compétition majeure ou après la fin d’une saison.

Recommandations pour optimiser le bien-être psychologique et maintenir la santé immunitaire les athlètes

1. Réduire au minimum le stress de la vie quotidienne;
2. Surveiller et « gérer » toutes les formes de stress (psychosociale et physique);
3. Apprécier les exigences de la vie quotidienne (p. ex. à l’aide de questionnaires);
4. Surveiller l’humeur, de même que les niveaux de stress et d’anxiété;
5. Mettre en œuvre une intervention de gestion du stress.

Recommandations pour un sommeil maintenant le système immunitaire et la santé des athlètes

1. Viser au moins 7 h de sommeil chaque nuit;
2. Éviter de restreindre le sommeil pendant plusieurs jours;
3. Apprécier chaque matin le degré de « fraîcheur » et de vigueur;
4. Envisager la possibilité de surveiller la durée et l’efficacité du sommeil en utilisant un appareil portable;
5. Miser si possible sur des siestes de jour;
6. Optimiser la routine d’hygiène du sommeil dans l’heure avant le coucher, p. ex. éviter les sources de stress psychologique et les écrans;
7. Veiller à ce que le sommeil se fasse dans l’obscurité.

Recommandations pour maintenir le système immunitaire et la santé des athlètes confrontés à des environnements particuliers

1. Gérer soigneusement la charge d’entraînement et la récupération;
lors de l’entraînement dans un environnement chaud ou hypoxique;
2. Miser sur l’acclimatation à la chaleur et à l’hypoxie (peut réduire les effets négatifs de ces facteurs environnementaux sur la fonction immunitaire);
3. Prendre des précautions supplémentaires pour éviter de prolonger les périodes où l’athlète doit respirer de grands volumes d’air froid et sec;
4. Veiller à une bonne hygiène du sommeil et personnelle, une bonne alimentation, et éviter les sources de stress inutile, surtout pendant les longs déplacements (camps d’entraînement et compétitions);
5. S’exposer parfois à un stress environnemental extrême de courte durée, p. ex. une douche froide de 30 secondes.

Recommandations nutritionnelles pour maintenir santé immunitaire chez les athlètes

1. Adapter l’apport énergétique à la dépense énergétique;
2. Éviter les régimes amaigrissants;
3. Avoir une alimentation équilibrée;
4. Veiller à ce qu’au moins 50 % de l’apport énergétique quotidien provienne de glucides;
5. Assurer un apport adéquat en protéines (1,2 à 1,6 g/kg de masse corporelle/jour);
6. Prendre 1000 UI/jour de vitamine D3 de l’automne au printemps;
7. Au début d’un rhume, prendre des pastilles d’acétate de zinc (75 mg/jour);
8. Pour l’athlète sujet aux infections ou voyageant, envisager la possibilité de prendre des probiotiques (≥ 1010 bactéries vivantes/jour).

À noter que l’examen de la littérature pertinente effectué à l’Institut national du sport du Québec ne fait pas ressortir l’intérêt des recommandations 7 et 8 : les effets salutaires de la consommation de pastilles d’acétate de zinc en cas de rhume ne fait pas l’objet d’un consensus, et les effets salutaires de la consommation de probiotiques semblent se limiter à la réduction des symptômes de la diarrhée du voyageur.

Dix recommandations pour éviter l’infection et maintenir la santé immunitaire chez les athlètes

1. Pratiquer une bonne hygiène des mains, éviter l’auto-inoculation en touchant les yeux, le nez et bouche;
2. Se faire vacciner;
3. Ne pas participer à une compétition, ni s’entraîner en présence de symptômes d’infection se manifestant au thorax;
4. Éviter les personnes malades, en particulier l’automne et l’hiver;
5. Surveiller et gérer toutes les formes de stress y compris physique et psychosocial;
6. « Gérer » soigneusement les situations pouvant augmenter le niveau de stress;
7. Remplacer les séances d’entraînement longues par des séances plus fréquentes, quitte à ce qu’elles soient plus intensives;
8. Planifier une semaine de repos actif chaque deuxième ou troisième semaine;
9. Viser au moins 7 h de sommeil chaque nuit;
10. Adopter une alimentation équilibrée et éviter le déficit énergétique.

À noter que cette fiche savoir-sport est, en quelque sorte, un complément aux fiches portant sur d’autres études, notamment celles citées plus bas sous «Lectures suggérées».

Source primaire

Walsh NP (2018) Recommendations to maintain immune health in athletes. Eur J Sport Sci 18:820-31.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29637836

Rédacteur

Guy Thibault, Ph.D., Directeur Sciences du sport, INS Québec

Éditeur

François Bieuzen, Ph.D., physiologiste de l’exercice, INS Québec

Mots-clés

Coronavirus, COVID-19, Fonction immunitaire, Intensité d’entraînement, Pandémie, charge d’entraînement

Lectures suggérées

Blogue du British Journal of Sport Medicine : https://blogs.bmj.com/bsmj/

Campbell JP et JE Turner (2018) Debunking the myth of exercise-induced immune suppression: Redefining the impact of exercise on immunological health Across the lifespan. Front Immunol. https://doi.org/10.3389/fimmu.2018.00648.

Hull JH, M Loosemore et M Schwellnus (2020) Respiratory health in athletes: facing the COVID-19 challenge. Lancet Respir Med S2213-2600(20)30175-2.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/32277869

Pyne DB et M Gleeson (1998) Effects of intensive exercise training on immunity in athletes. Int J Sports Med 19(Suppl 3):S183-91; discussion : S191-4.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/9722284

Schwellnus M et coll. (2016) How much is too much? (Part 2) International Olympic Committee consensus statement on load in sport and risk of illness. Br J Sports Med 50:1043-52.

Simpson RJ et coll. (2020) Can exercise affect immune function to increase susceptibility to infection? Exerc Immunol Rev 26:8-22.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/32139352

Walsh NP et SJ Oliver (2016) Exercise, immune function and respiratory infection: An update on the influence of training and environmental stress. Immunol Cell Biol 94:132-9.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26563736

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