S762 - L’entraînement aérobie peut nuire à l’hypertrophie et au développement de la force et de la puissance musculaires

On appelle entraînement combiné ou simultané (concurrent training, en anglais) un programme qui combine deux ou plusieurs types d’entraînement, par exemple la musculation et l’entraînement aérobie. L’entraînement simultané est courant dans les sports qui requièrent à la fois de la puissance ou de la force musculaire et de l’endurance. On pense notamment au patinage de vitesse longue piste, au ski de fond, au cyclisme, etc.

Toutefois, certaines études suggèrent que l’entraînement en parallèle de l’aptitude aérobie et de la force ou de la puissance musculaire se traduit par une amélioration moins marquée des qualités musculaires que la musculation effectuée seule, sans l’entraînement aérobie. Ce phénomène a été nommé interférence.

Afin d’optimiser la programmation de la musculation et de l’entraînement aérobie, on se demande quelles sont les composantes de l’entraînement aérobie (modalité, intensité, durée) les plus nuisibles et quelles sont les qualités musculaires (force, puissance, hypertrophie) les plus touchées par l’interférence. C’est ce qu’ont tenté de clarifier certains chercheurs dans cette méta-analyse publiée en 2011.

On a retenu 21 études où l’on comparait les effets de l’entraînement aérobie, de la musculation et de l’entraînement combiné. Les effets de l’entraînement combiné sur l’hypertrophie, la force et la puissance musculaires, le VO2max et la masse adipeuse ont été étudiés. Les résultats sont résumés dans la figure.

Voir tableau : http://207.253.82.4/apps/fiche/soleweb/Download.aspx?id=820&fichier=Graphique_FicheSSP_S762.docx

Dimension de l’effet de la musculation, de l’entraînement aérobie et de l’entraînement combiné sur l’hypertrophie, la force et la puissance des muscles des membres inférieurs (Lower Body Hypertrophy, Lower Body Strenght and Lower Body Power), le VO2max et la masse adipeuse (Body Fat).
* : Significativement différent de la musculation (p < 0,05).
& : Significativement différent de l’entraînement aérobie (p < 0,05).

HYPERTROPHIE ET FORCE MUSCULAIRES

Par rapport à la situation témoin (musculation seulement), l’hypertrophie et les gains en force musculaire n’étaient pas significativement inférieurs lorsque le programme d’entraînement comportait une combinaison de musculation et d’entraînement aérobie. Seul l’entraînement combiné où la portion aérobie était exécutée en course à pied a freiné le développement des qualités musculaires. L’hypertrophie et les gains en force étaient négativement corrélés à la fréquence (r = 0,26 et r = 0,31) et à la durée moyenne (r = 0,75 et r = 0,34) des séances d’entraînement aérobie. La répartition des séances d’entraînement aérobie dans le programme d’entraînement n’est pas ressortie comme déterminant d’une éventuelle interférence. Ainsi, les effets sur le volume et la force musculaires étaient les mêmes, que la séance d’entraînement aérobie soit exécutée le même jour que la musculation ou non. L’entraînement cardiovasculaire, qui sollicitait davantage les membres inférieurs, n’a pas eu d’effets délétères sur l’hypertrophie ou le développement de la force des membres supérieurs.

PUISSANCE MUSCULAIRE

L’entraînement combiné semble interférer davantage avec le développement de la puissance musculaire. En effet, les gains en puissance musculaire étaient significativement plus petits chez les sujets où l’entraînement aérobie et la musculation étaient exécutés en parallèle, par rapport à ceux qui n’avaient fait que de la musculation. Tout comme la force et l’hypertrophie, le développement de la puissance musculaire était d’autant plus compromis que la fréquence et la durée des séances d’entraînement cardiovasculaire étaient élevées. Ces résultats vont dans le même sens que ceux d’études qui soutenaient que l’effet de l’interférence était plus prononcé sur la force à vitesse élevée qu’à vitesse faible.

VO2max

L’ajout de séances de musculation à un programme d’entraînement aérobie ne semble pas avoir d’effets nuisibles sur le développement de l’aptitude aérobie. Une étude récente suggère même que la musculation, combinée à un entraînement cardiovasculaire, puisse s’accompagner d’une augmentation plus marquée de l’endurance chez des athlètes d’endurance d’élite que l’entraînement aérobie seul (voir lectures suggérées).

MASSE ADIPEUSE

Un des avantages de l’entraînement combiné serait ses effets sur la masse grasse. Les résultats de la méta-analyse indiquent qu’un entraînement combiné incluant de l’entraînement aérobie à intensité élevée (% FCmax) et de la musculation constitue un stimulus idéal pour la réduction de la masse adipeuse.

RECOMMANDATIONS

Pour les sports de puissance ou de force où l’aptitude aérobie revêt une certaine importance, il est recommandé :

1. D’éviter si possible l’entraînement aérobie des muscles entraînés en force ou en puissance, puisque le phénomène d’interférence semble être spécifique à la partie du corps entraînée en endurance.

2. Augmenter l’intensité et diminuer la fréquence (< 3 fois par semaine) et la durée (< 20 30 minutes) des séances d’entraînement cardiovasculaire.

3. Miser sur des séances de vélo plutôt que de course à pied.

4. Les athlètes des sports de puissance devraient limiter l’entraînement combiné de la puissance et de l’endurance aérobie, davantage que les athlètes de sports demandant de la force ou une grande masse musculaire.

Finalement, les athlètes de sports d’endurance où la force ou la puissance musculaire est également un déterminant de la performance (ex. kayak, ski de fond, etc.), ne devraient pas se priver de faire de la musculation, car cela pourrait même améliorer leur endurance.

Source primaire

Wilson JM (2012) Concurrent training: A meta analysis examining interference of aerobic and resistance exercise. J Strength Cond Res 26(8):2293-307. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22002517

Rédacteur

Myriam Paquette
B.Sc., étudiante à la maîtrise en physiologie de l’exercice

Éditeur

Guy Thibault
Ph. D., Direction du sport et de l’activité physique, gouvernement du Québec; Département de kinésiologie de l’Université de Montréal; et INS Québec

Mots-clés

entraînement combiné, musculation, Force, puissance, hypertrophie, endurance

Lectures suggérées

Aagaard P et JL Andersen (2010) Effects of strength training on endurance capacity in top-level endurance athletes. Scand J Med Sci Sports 20(2):39-47.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/7193134

García-Pallarés J et M Izquierdo (2011) Strategies to optimize concurrent training of strength and aerobic fitness for rowing and canoeing. Sports Med 41(4):329-43.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21425890

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