S748 - L’entraînement à jeun stimule davantage le métabolisme oxydatif

L’entraînement à jeun a longtemps été considéré comme une technique efficace pour perdre du poids. Toutefois, des études récentes indiquent qu’au contraire, il est moins difficile de dépenser à l’entraînement une grande quantité de calories si l’on profite d’un apport en glucides. Bien qu’on utilise moins de lipides durant un entraînement précédé d’un apport en glucides, on en oxyde davantage au cours des heures qui suivent l’effort (voir lectures suggérées). S’entraîner à jeun est aussi une pratique courante chez les athlètes qui espèrent ainsi améliorer leur aptitude aérobie (endurance) et, donc, leurs performances. Toutefois, on s’est rarement penché sur les effets de l’entraînement à jeun sur la performance lors d’épreuves de longue durée.

Durant l’effort, la disponibilité des différents substrats influe sur leur utilisation, de sorte que l’ingestion de glucides avant ou pendant l’effort s’accompagne d’une augmentation de leur oxydation, au détriment de l’oxydation des lipides. On s’attend donc à ce que l’entraînement à jeun stimule davantage l’oxydation des lipides et qu’il améliore l’aptitude à produire de l’énergie par oxydation des gras, davantage que l’entraînement suivant un repas. La stimulation accrue de l’oxydation des lipides se traduirait par une amélioration de la performance dans les épreuves de longue durée.

On a donc divisé 20 hommes physiquement actifs en deux groupes, le premier s’entraînant à jeun, le deuxième s’entraînant avec un apport en glucides suffisant, avant et pendant l’exercice. Tous les tests et entraînements ont été exécutés à vélo. Pendant six semaines, les deux groupes ont suivi un entraînement identique, comprenant deux séances de 60 minutes et deux séances de 90 minutes de pédalage à une fréquence cardiaque correspondant à 70 % de leur consommation maximale d’oxygène (VO2max).

Au début puis à la fin des six semaines d’entraînement, tous les sujets ont été soumis à un test d’évaluation du VO2max, un contre-la-montre d’une heure, et un test à jeun de deux heures à charge constante (environ 65 % du VO2max de départ).

Après les six semaines d’entraînement, le VO2max des 20 sujets avait augmenté de 9 %, leur performance au contre-la-montre de 8 % et la densité capillaire dans le muscle vaste latéral de 10 %. L’oxydation totale des lipides était presque deux fois plus élevée lors de l’exercice à jeun. Seuls les sujets entraînés à jeun ont augmenté leur taux d’oxydation des lipides intramusculaires pendant l’exercice. En effet, alors que le contenu en lipides intramusculaires n’a pas changé au cours des six semaines d’entraînement, ni dans un groupe, ni dans l’autre, leur utilisation a plus que doublé chez les sujets entraînés à jeun, alors qu’aucun changement n’a été observé chez les sujets de l’autre groupe.

Il semble que l’entraînement à jeun soit plus efficace pour augmenter la capacité oxydative des muscles. En effet, l’entraînement à jeun s’est accompagné d’une augmentation plus marquée de l’activité de deux enzymes oxydatives (CS et ß-HAD), ainsi que d’une augmentation plus importante du taux maximal d’oxydation des lipides. L’augmentation de l’oxydation des lipides permettrait de préserver les réserves de glycogène.

Ainsi, pour une même intensité et un même volume d’entraînement, l’entraînement à jeun constituerait un meilleur stimulus que l’entraînement avec un apport glucidique pour l’amélioration de la capacité oxydative musculaire.

Mais attention! Dans l’étude, ces adaptations ne se sont pas traduites par une amélioration supérieure de la performance chez les sujets entraînés à jeun. Les chercheurs avancent l’idée que l’intensité d’entraînement était trop faible et la durée de la période d’entraînement trop courte pour induire des améliorations importantes de la performance, ce qui a rendu imperceptibles les différences entre les deux groupes.

Pendant les séances d’entraînement, les sujets ne tenaient qu’une intensité de 70 % de leur VO2max. Or, on sait que l’entraînement à des intensités supérieures permet d’obtenir des améliorations plus importantes de l’aptitude aérobie. Soulignons que les athlètes peuvent moins facilement tenir des intensités très élevées quand ils sont à jeun. L’entraînement avec apport suffisant en glucides permet de maintenir des intensités de travail plus élevées ou plus longtemps, pour un même niveau de fatigue. Ainsi, cet avantage de l’entraînement plus intense s’oppose à l’avantage de l’entraînement à jeun, soit la stimulation plus importante du métabolisme des lipides.

L’entraînement à jeun étant beaucoup plus difficile, il est d’autant plus important d’être certain de ses effets positifs sur la performance avant d’inviter les athlètes à s’y soumettre.

Bref, l’entraînement à jeun stimule le métabolisme oxydatif davantage que l’entraînement avec apport glucidique, mais il n’est pas certain que cela se traduise par de meilleures performances.

Source primaire

Van Proeyen K et coll. (2011) Beneficial metabolic adaptations due to endurance exercise training in the fasted state. J Appl Physiol 110:236-45.

Rédacteur

Myriam Paquette
B.Sc., étudiante à la maîtrise en physiologie de l’exercice

Éditeur

Guy Thibault
Ph. D., Direction du sport et de l’activité physique, gouvernement du Québec; Département de kinésiologie de l’Université de Montréal; et INS Québec

Mots-clés

Entraînement à jeun, oxydation des gras, endurance

Lectures suggérées

De Bock K et coll. (2008) Effect of training in the fasted state on metabolic responses during exercise with carbohydrate intake. J Appl Physiol 104:1045-55.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18276898

Paoli A et coll. (2011) Exercising fasting or fed to enhance fat loss? Influence of food intake on respiratory ratio and excess postexercise oxygen consumption after a bout of endurance training. Int J Sport Nutr Exerc Metab 21(1):48-54.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21411835

Péronnet F, G Thibault. et J Tremblay (2010) Lipoxmax - Mythe ou réalité? Sport et Vie 119:26-32.
www.sport-et-vie.com/numero-119/effort-maigrir-grande-illusion-lipoxmax/lipoxmax-mythe-realite.26694.php#article_26694

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