S732 - Une focalisation externe de l’attention pendant l’entraînement en pliométrie permet d’améliorer davantage la performance au saut en longueur et au saut en contre-mouvement

La hauteur du saut est un déterminant majeur de la performance dans plusieurs sports, qu’on pense au basketball, au volleyball, ou encore au saut en hauteur en athlétisme. La pliométrie est une technique d’entraînement répandue pour l’amélioration de la puissance musculaire et de la hauteur du saut. Elle permet d’améliorer l’efficacité du cycle étirement-contraction, de sorte que plus d’énergie est emmagasinée puis restituée dans la phase concentrique du mouvement. On sait que l’efficacité de l’entraînement en pliométrie nécessite une technique adéquate et dépend de la charge d’entraînement, de la condition physique, de l’âge, du sexe et de l’expérience d’entraînement de l’athlète (voir lectures suggérées). De récentes études indiquent que la focalisation de l’attention pendant l’entraînement influe sur le mouvement et donc sur l’efficacité de l’entraînement.

Une focalisation externe de l’attention consiste à diriger son attention sur le résultat d’une certaine performance (par exemple, se concentrer sur sauter le plus loin possible après une ligne). Au contraire, une focalisation interne dirige l’attention sur le mouvement du corps ou d’une partie spécifique du corps (par exemple, se concentrer sur l’extension de ses genoux).

On sait qu’une focalisation externe de l’attention permet de réaliser une meilleure performance (de sauter plus loin ou plus haut) qu’une focalisation interne. L’hypothèse de l’action contrainte voudrait que, lorsque l’attention est focalisée sur un élément externe, le traitement de la commande motrice se fait de façon automatique. Cette automaticité permettrait une meilleure coordination et donc une meilleure performance motrice. Au contraire, le fait de porter son attention sur l’exécution du mouvement interromprait ce traitement automatique et dégraderait la performance motrice.

Toutefois, on ignore les effets d’une focalisation interne ou externe de l’attention durant un entraînement de plusieurs semaines en pliométrie sur la performance au saut en fin de programme.
On a donc divisé en trois groupes 36 hommes actifs et familiers avec l’entraînement en pliométrie : focalisation externe de l’attention (EXT), focalisation interne de l’attention (INT) et témoins (T). Les trois groupes ont été soumis à neuf semaines d’entraînement, à une fréquence de 2 ou 3 fois par semaines. Durant les entraînements, les deux premiers groupes ont reçu des indications verbales conçues pour induire une focalisation externe ou interne de l’attention, alors que le troisième groupe n’a reçu aucune indication quant au focus attentionnel. Tous les groupes ont complété le même entraînement et aucun groupe n’a reçu de rétroaction sur l’exécution du mouvement. On a testé, au début et à la fin du protocole d’entraînement, la performance au saut en longueur, au saut en contre-mouvement (counter mouvement jump, en anglais, CMJ) et au saut en contrebas (drop jump, en anglais, DJ). Durant le CMJ et le DJ, la flexion des genoux et la force de réaction au sol ont été mesurées. Pendant les séances de tests, tous les participants ont reçu les mêmes instructions, soit de sauter le plus haut ou le plus loin possible, selon les tests. Trois essais ont été exécutés pour chacun des tests et le meilleur des trois essais a été analysé pour chacun des sujets.

On s’attendait à ce que les sujets chez qui on avait induit une focalisation externe de l’attention durant les séances d’entraînement augmentent davantage leur performance au saut, leur force de réaction au sol et optimisent leur flexion des genoux, permettant ainsi un cycle étirement-contraction plus efficace.

RÉSULTATS

Les trois groupes ont vu leur performance au saut en longueur, au CMJ et au DJ augmenter. Au saut en longueur comme au CMJ, le groupe qui s’était entraîné avec une focalisation externe de l’attention a profité d’une amélioration supérieure comparativement aux deux autres groupes. Cela pourrait s’expliquer par une augmentation significativement plus importante de la force de réaction au sol et de la flexion des genoux chez le groupe EXT. Dans le CMJ, l’augmentation de la flexion des genoux laisse plus de temps pour générer de la force et permet un cycle étirement-contraction plus efficace.

Les trois groupes ont aussi amélioré significativement leur performance au DJ. Cette fois, le groupe EXT s’est amélioré autant que les deux autres groupes. Toutefois, les stratégies utilisées par les participants pour augmenter la hauteur de leur saut varie. Ainsi, le groupe EXT a augmenté la flexion des genoux, le temps de contact au sol et la force produite, alors que les autres groupes ont diminué leur temps de contact au sol et augmenté leur force produite, sans changer ou en diminuant la flexion des genoux. Dans le cas du DJ, l’augmentation du temps de contact au sol nuit au cycle étirement-contraction en causant une perte d’énergie élastique.

Ainsi, l’entraînement effectué avec une focalisation interne de l’attention n’a pas provoqué d’améliorations plus importantes et ce, quelque soit le test. Cette constatation est importante puisque qu’une étude menée auprès d’athlètes d’élite en athlétisme aux États-Unis indiquait que 84,6 % des entraîneurs donnent des instructions qui favorisent une focalisation interne de l’attention durant les pratiques et que 69 % de athlètes sondés utilisent une focalisation interne de l’attention en compétition. Les résultats de la présente étude suggèrent que ces façons de faire pourraient nuire à la performance.

Ainsi, les chercheurs concluent qu’il est préférable d’encourager les athlètes à adopter une focalisation externe de l’attention durant l’entraînement en pliométrie. Ils proposent des consignes comme « saute au-delà de la ligne », ou encore « touche la balle suspendue », selon l’exercice. Toutefois, une autre étude n’a pas mis en évidence l’intérêt de la focalisation interne ni de la focalisation externe de l’attention sur la performance dans des tâches motrices très complexes (voir lectures suggérées). Ainsi, les résultats de cette étude ne peuvent être généralisés à l’exécution d’actions plus complexes comme la course de haies en athlétisme, par exemple.

Source primaire

Makaruk H et coll. (2012) The role of attentional focus in plyometric training. J Sports Med Phys Fitness 52(3):319-27.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22648471

Rédacteur

Myriam Paquette
B.Sc., étudiante à la maîtrise en physiologie de l’exercice

Éditeur

Guy Thibault
Ph. D., Direction du sport et de l’activité physique, gouvernement du Québec; Département de kinésiologie de l’Université de Montréal; et INS Québec

Mots-clés

pliométrie, focalisation de l’attention, saut en longueur, saut en contrebas, saut en contre-mouvement

Lectures suggérées

de Villarreal ES et coll. (2008) Low and moderate plyometric training frequency produces greater jumping and sprinting gains compared with high frequency. J Strength Cond Res 22(3):715-25.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18438249

Poolton JM et coll. (2006) Benefits of an external focus of attention: Common coding or conscious processing? J Sports Sci 24(1):89-99.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16368617

Porter JM et coll. (2010) Focus of attention and verbal instructions: Strategies of elite track and field coaches and athletes. Sports Science Review 19(3):77-89.
http://versita.metapress.com/content/616778482k201503/fulltext.pdf

Sports ciblés

Tous les sports où la hauteur du saut (en longueur ou vertical) est un déterminant de la performance

Imprimer Ajouter à mes favoris Haut de page


© Institut national du sport du Québec,