S57 - L’immersion partielle en eau froide permet-elle d’améliorer la performance lors d’une épreuve réalisée en conditions chaudes et humides ?

L’exercice induit inévitablement une augmentation de la température corporelle. Lors de la poursuite de l’exercice, l’apport sanguin vers les muscles sollicités est contrecarré par une augmentation de l’approvisionnement sanguin vers la peau pour le refroidissement. Dans ces conditions, on peut penser qu’une réduction pré-exercice de la température pourrait améliorer la performance en sprint en raison d’une vasoconstriction sous-cutanée pouvant induire une augmentation du volume sanguin central. En outre, l’exposition au froid augmente la concentration de catécholamines circulantes qui pourrait avoir un effet bénéfique sur la performance en sprint.

Afin de vérifier cette hypothèse, 13 cyclistes de niveau national et international ont réalisé un sprint de 70 secondes, simulant approximativement la durée d’un 1 000 mètres. Ce sprint a été réalisé sur un ergocycle, dans une température ambiante de 29 °C et à un taux d’humidité relative de 80 %, à deux occasions :

- soit sans immersion préalable (Groupe Contrôle ; GC),
- soit après une immersion du tronc dans l’eau froide à 18 °C, puis à 12-14 °C pendant une durée permettant d’abaisser la température rectale de 0,3 °C ou 30 minutes maximum (Groupe Expérimental ; GE).

Le sprint était précédé par un échauffement de 10 minutes sur ergocyle (à 60 % VO2pic), suivi par des étirements. Pour GE, un délai de 10 minutes a été observé entre la fin de l’immersion et le début de l’échauffement. Les paramètres suivants ont été mesurés, notamment avant pendant après l’échauffement et avant-après l’exercice :

- la puissance développée pendant l’exercice,
- la température rectale et la température cutanée à différents sites (ces deux paramètres permettant une évaluation de la température corporelle),
- la concentration sanguine en lactate,
- le volume d’oxygène consommé,
- la fréquence cardiaque
- et la perception de l’effort.

L’immersion du tronc dans l’eau froide induit une réduction de la température corporelle, et de la température cutanée du haut du corps. La température cutanée des membres inférieurs est également réduite pendant l’exercice, mais aucune différence n’est observée entre les deux groupes aussi bien après l’échauffement que pendant l’exercice. La fréquence cardiaque est inférieure pour GE lors de l’échauffement, mais pas pendant l’exercice. Aucune différence significative n’est observée entre les groupes concernant la concentration sanguine de lactate. Enfin, l’immersion du tronc dans l’eau froide permet une augmentation significative de la puissance développée lors du sprint de 70 secondes (603 +-66 W pour GE contre 581 +-57 W pour GC).

L’immersion pré-exercice du tronc des cyclistes dans l’eau froide permet une amélioration de la performance lors d’une épreuve de sprint réalisée en conditions chaudes et humides. L’amélioration de la performance pourrait être imputable à une augmentation de l’approvisionnement sanguin vers les muscles sollicités pendant l’exercice. Cette meilleure irrigation serait la conséquence d’une réduction de la circulation sanguine superficielle au niveau du tronc, favorisant ainsi une augmentation de la circulation sanguine centrale. Un tel phénomène permettrait :

- une amélioration de l’apport d’oxygène aux muscles actifs (donc rendrait possible une contribution accrue du système aérobie à l’apport d’énergie),
- une élimination de déchets métaboliques plus efficace. Enfin, l’influence de l’immersion sur la perception de l’effort pourrait jouer un rôle sur la performance. En effet, la perception de l’effort est augmentée pour GE au début de l’échauffement, mais est significativement inférieure à celle rapportée par GC à la fin de l’échauffement.

Cette étude montre que l’immersion dans l’eau froide d’une partie du corps, ne comprenant pas les muscles sollicités pendant l’effort ultérieur, permet d’améliorer la performance lors d’un sprint subséquent réalisé en conditions chaudes et humides, à condition de veiller à respecter un délai suffisant entre la fin de l’immersion et le début de l’exercice (vraisemblablement au moins 20 minutes). Évidemment, il est fortement conseiller de tester un tel protocole à l’entraînement, d’autant que la réponse à l’immersion dans l’eau froide est très individuelle.

Source primaire

Effect of precooling on high intensity cycling performance. MARSH D., SLEIVERT G. Br. 1999 J. Sports Med., 393-397.

Rédacteur

Anne Michaut
Docteur en sciences et techniques des activités physiques et sportives - Laboratoire de biomécanique et de physiologie - INSEP

Éditeur

Chantalle Thépaut-Mathieu
Docteur es sciences, chef du département des sciences du sport, INSEP
http://sciences.campus-insep.com

Mots-clés

Ergonomie, immersion, intensité de l'effort, métabolisme énergétique, performance, régulation thermique, température ambiante, température corporelle, gestion de la compétition, préparation à la performance

Lectures suggérées

CLARK V.-R., HOPKINS W.-G., HAWLEY J.-A. The size of the placebo effect of a sports drink in endurance cycling performance. 1998 Med. Sci. Sports Exerc.,30 : S61.

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