S129 - Est-on capable de choisir d’entraîner un type de fibres musculaires par l’électrostimulation ?

Outre le relatif intérêt que peut susciter l’utilisation de l’électrostimulation (ES) dans le cadre de l’augmentation de gain de force, il est souvent avancé que, par cette modalité de déclenchement artificiel de contraction, il est possible de solliciter (donc d’entraîner) un type particulier de fibres musculaires. Autrement dit, cela reviendrait à avoir, par ES, le moyen d’échapper à l’ordre naturel de recrutement des fibres musculaires organisé en fonction de la taille du corps cellulaire des motoneurones. Ce principe de recrutement (démontré par HENNEMAN et coll -1965) indique que les unités motrices associées à des motoneurones de faible volume (fibres I) sont plus excitables que les motoneurones de volume plus important (fibres II). Ainsi, sous contraction volontaire, on ne peut prétendre pouvoir entraîner de manière sélective uniquement les fibres II car les fibres I répondent, dès les premiers niveaux de force développés, avant que le niveau d’excitation soit suffisant pour déclencher une contraction des fibres II.

Dans le cas de l’ES, la genèse de l’excitation de la fibre nerveuse n’est plus localisée au corps cellulaire du motoneurone (au niveau de la moelle épinière), mais à la terminaison de la fibre nerveuse (à la jonction neuro-musculaire). Aussi, il a pu être avancé que la loi du recrutement en fonction de la taille n’était plus vérifiée : à changement de structure excitable correspondrait alors un autre principe de recrutement, donc à un effet particulier d’un entraînement sous ES.

De nombreuses études ont tenté de vérifier, dans le cas de l’ES, s'il existerait donc un autre principe organisateur du recrutement des unités motrices. Pour ce faire, il a été identifié la nature des unités motrices sollicitées en comparant des réponses musculaires obtenues sous ES ou CV, dans le cas de faibles et forts niveaux de contraction. La détermination de la typologie des unités motrices sollicitées a été réalisée sur la base des caractéristiques qui différencient les réponses des unités motrices lentes ou rapides, soit la vitesse de conduction des fibres nerveuses (KNAFLITZ et coll, 1990), les paramètres mécaniques de la secousse musculaire (FEIREISEN et coll, 1997), la fatigabilité (THEPAUT-MATHIEU et coll, 1992). L’identification des fibres sollicitées a pu être aussi réalisée au regard de la localisation de la baisse des substrats (SALTIN et coll, 1990).

L’ensemble des résultats fait apparaître que le recrutement sous ES n’obéit plus strictement au principe de recrutement de la taille des motoneurones. Cependant, aucun résultat expérimental ne permet d’affirmer que le recrutement est organisé sous un autre mode, voire contrôlé en fonction de paramètres de courant de stimulation judicieusement choisis.

Le recrutement des fibres musculaires semble quelque peu différent sous ES, et s’organiserait surtout en fonction de la localisation du champ électrique de stimulation. Sont recrutées, donc entraînées, les fibres touchées par le champ électrique qui, par ailleurs, présente une géométrie variable, pas toujours prévisible car dépendante des résistances des milieux traversés (peau, tissu adipeux, vaisseaux sanguins…).

Dans le cadre d’un entraînement sous ES, prétendre solliciter de manière contrôlée un type de fibre plutôt qu’un autre, reste du domaine spéculatif. Rien ne permet de laisser espérer à l’entraîneur qu’il est possible sous ES de renforcer une typologie musculaire particulière.

Source primaire

Électrostimulation et recrutement différentiel des unités motrices THEPAUT-MATHIEU Chantalle annales de Kinésithérapie 25 : 115-118.

Rédacteur

Chantalle THEPAUT-MATHIEU
Doctorat es sciences. Chef du Département des Sciences du Sport (INSEP)

Éditeur

Christian Miller

Mots-clés

Électrostimulation musculaire, entraînement, fibre musculaire, recrutement, préparation à la performance

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FEIRENSEN P., DUCHATEAU J – Motor unit recruitment order during voluntary and electrically induced contractions in the tibialis anterior. Experimental Brain Research 1997, 114 : 117-123.

HENNEMAN E., SOMJEN G, CARPENTIER D.O. Functional significance of cell size in spinal motoneurons Journal of. Neurophysiology 1965, 28 : 560-580.

KNAFLITZ M., MERLETTI R., DELUCA C.J. – Inference of motor unit recruitment order in voluntary and electrically elicited contractions Journal. Applied of. Physiology 1990, 68 : 1657-1667.

SALTIN B., STRANGE .S, BANSBO J. et coll – Central and peripheral cardiovascular adaptations to electrically induced and voluntary exercise Proceedings for 4 th European. Symposium Life Science Research. Space 1990 : ESA SP-307 : 591-995.

THEPAUT-MATHIEU C., POUGHEON M. Électrostimulation appliquée de manière prolongée. Réponse du système neuromusculaire . Kinésithérapie Scientifique 1992, 308 : 15-22.

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