Le coût énergétique (CE) constitue l'un des principaux déterminants physiologiques de la performance dans les courses de fond ou de demi-fond. Il correspond à une quantité d'énergie dépensée par unité de distance et est exprimé en ml d'O2.kg-1.mn-1. Parmi les facteurs pouvant influencer le CE, il semble que l'efficacité du processus de stockage-restitution d'énergie élastique soit déterminante, les coureurs les plus économiques étant les plus efficaces. Or, cette efficacité dépend en partie de la raideur du système musculo-tendineux (RMT, en N. m-1), une diminution de RMT étant associée à une augmentation du CE. Des études récentes ont montré qu'un renforcement musculaire adapté permettait de diminuer la dépense énergétique pour une vitesse donnée et, par conséquent, d'améliorer la performance. Par ailleurs, Cornu et al. (1997) mettent en évidence une augmentation de la raideur musculo-articulaire de la cheville suite à un entraînement pliométrique.

L'objet de l'étude est donc de vérifier si un entraînement musculaire de type pliométrique peut améliorer conjointement la RMT et la performance sur 3 000 m en course à pied. Les auteurs émettent l'hypothèse que l'augmentation de la RMT devrait conduire à minimiser le CE.

Deux groupes ont été étudiés : un groupe expérimental (E) réalisant un entraînement pliométrique de 6 semaines et un groupe contrôle (C). Afin de caractériser les effets de cet entraînement, le groupe C était évalué de manière identique au groupe E sans toutefois réaliser l'entraînement pliométrique. Les groupes E et C étaient composés respectivement de 8 et 9 coureurs de fond qui réalisaient au minimum 80 km par semaine et dont la VO2max moyenne était d'environ 58 ml d'O2.kg-1.min-1. L'entraînement pliométrique, imposé à raison de 2 puis 3 séances par semaine, était composé de sauts divers (à l'aide d'un ou deux membres, verticalement ou horizontalement, avec ou sans obstacles, etc.). Une progression de 60 à 180 sauts par séance a été imposée de la 1re à la 6e semaine. Différents tests ont permis d'évaluer les qualités physiologiques et musculaires des athlètes avant et après la phase d'entraînement :

- un test d'effort progressif sur tapis roulant a permis de déterminer les paramètres suivants : - CE, estimé à partir de la consommation d'O2 mesurée à 12, 14 et 16 km. h-1 - VO2max (ml d'O2.min-1.kg-1) : consommation maximale d'O2 - VSla (km. h-1) : vitesse de course pour laquelle la lactatémie augmente significativement
- la force maximale volontaire de flexion plantaire (Fiso,max, en N) était mesurée lors d'un test de contraction isométrique (voir Figure 1: https://notyss.com/savoirsport/downloadfile?id=598&fichier=S132_figure1.doc )
- la raideur musculo-tendineuse des fléchisseurs plantaires (RMT) était mesurée à différents niveaux de la force maximale (25, 50 et 75 %) à partir d'oscillations sinusoïdales engendrées par une perturbation de la charge supportée par la cheville (voir Figure 1: https://notyss.com/savoirsport/downloadfile?id=598&fichier=S132_figure1.doc )
- enfin, la hauteur maximale lors d'un saut vertical avec contre mouvement (CMJ, counter movement jump : saut précédé d’une flexion des membres inférieurs), la distance horizontale maximale lors d'une série de 5 rebonds (5R) et le temps au 3 000 m (T3000), étaient également mesurés.

Alors qu'aucun changement n'est observé après l'entraînement pliométrique pour le groupe C, l'analyse des résultats montre que les sujets du groupe E améliorent de manière significative la hauteur des CMJ, la distance parcourue en 5 rebonds, la RMT à 75 % et la Fiso,max. Ces augmentations sont associées à des diminutions significatives de CE (pour les 3 vitesses testées) et du temps au 3 000 m. Les autres paramètres ne varient pas. Les auteurs n'observent pas de relation entre la variation de T3000 et celle du coût énergétique (CE). Cependant, il existe des corrélations négatives et significatives entre les variations du CE et celles i) de la raideur (RMT) des fléchisseurs plantaires et ii) de la performance au test de 5R.

L'entraînement pliométrique de 6 semaines conduit donc à une diminution du coût énergétique qui, au regard des corrélations observées, semble être due à une augmentation de la raideur musculo-tendineuse. Il est supposé que de telles adaptations de la raideur conduisent à une meilleure utilisation de l'énergie absorbée lors des impacts au sol pendant la course. En l'absence de changements de la consommation maximale d'O2 et du seuil lactique, ces variations sont certainement à l'origine de l'augmentation de la performance sur 3 000 m.

En conclusion, bien que la course à pied soit en elle-même une activité intense de cycle étirements-raccourcissements, l'étude montre que les coureurs de fond ont intérêt à insérer des exercices pliométriques dans leur entraînement.