S343 - Guider les parents sur les comportements et valeurs à adopter est nécessaire pour favoriser la réussite des jeunes sportifs

De multiples facteurs entrent en jeu dans la réalisation de performances sportives. Depuis une dizaine d’années, l’importance des facteurs familiaux a été mise en évidence. Les parents ont l’influence – avec les entraîneurs – la plus forte dans la vie des sportifs. Pour optimiser la progression des jeunes, il est donc pertinent de tenir compte des relations entre parents et sportifs.

On sait que les débuts dans l’activité sportive et la manière dont évoluera la carrière sportive sont liés aux parents. Le support des parents est presque indispensable pour la progression d’un jeune. Des travaux ont montré que les liens parents/enfant doivent évoluer au fil des années pour laisser progressivement l’enfant prendre son indépendance. Sur un versant négatif, des sportifs disent ressentir une certaine pression à cause d’un parent. Mais si l’influence des parents est indiscutable, on sait peu de choses concrètes sur leurs comportements et les conséquences de ceux-ci.

Pour mieux approfondir les connaissances pratiques sur le sujet, cette étude s’est tournée vers le point de vue des entraîneurs. Ils sont en effet les mieux placés pour observer les modes de relation parents/enfant et ont un regard plus distancié que ses protagonistes. Le tennis a été choisi parce qu’il est un des sports où s’illustre le mieux l’importance du rôle des parents – on peut parler de sports « parentaux » (sports individuels qui impliquent que les parents doivent conduire l’enfant aux entraînements et compétition, financer, voire le faire jouer, etc.).

Des entretiens ont été réalisés avec 20 entraîneurs de tennis.

Il ressort de l’analyse une riche description de comportements parentaux favorables et défavorables aux joueurs. Une partie des thèmes vient confirmer les résultats de travaux antérieurs.

Parmi les plus saillants, on retrouve des rôles de parents favorables comme :

- le support émotionnel;
- les encouragements;
- l’investissement financier et en temps (aide aux déplacements, achat de matériel, accompagnement aux compétitions);
- l’éducation prodiguée à l’enfant (comportement sur le terrain, valeurs et esprit sportif);
- la confiance en l’entraîneur.

D’autres comportements sont majoritairement jugés défavorables comme ceux de parents non sportifs, trop/trop peu investis. Les parents trop investis en particulier :

- exercent une pression (obligent l’enfant à faire de la compétition, à jouer contre son gré ou à s’entraîner en quantité);
- critiquent;
- ont des ambitions démesurées;
- projettent leurs rêves déçus sur le début de carrière de leur enfant ou interfèrent dans le travail de l’entraîneur.

Une partie des thèmes sont plus originaux. Sur le versant positif, nous avons repéré :

- les feed-backs donnés après les matchs mais à « froid »;
- l’anormalité des relations parents/sportifs par rapport aux enfants suivant un cursus scolaire classique. (En effet, les parents de certains joueurs, notamment du plus haut niveau, sont omniprésents et très investis, exigeants…). Les entraîneurs remarquent que les relations parents/sportif sont différentes (« extra-ordinaires ») de par le mode de vie particulier du sportif par rapport à un étudiant normal (rythme/temps libre/vacances/etc.);
- la distance à prendre par rapport au niveau de l’enfant, à l’importance du sport et des résultats (relativiser).

Sur le versant négatif, les entraîneurs évoquent la valorisation excessive et son alternance avec le dénigrement de l’enfant, la violence verbale et physique, les comportements perturbants pendant les matchs.

Les opinions des entraîneurs divergent sur l’importance à accorder à l’école par rapport au sport. Certains pensent que la réussite à l’école doit rester prioritaire; pour d’autres, il est nécessaire de se consacrer au tennis au vu de l’impossibilité de concilier les deux, et une partie des entraîneurs prône l’équilibre entre les deux.

Les entraîneurs repèrent aussi des différences de comportements entre pères et mères. Les pères semblent plus nombreux à avoir des comportements défavorables aux enfants (comportements liés aux résultats, violence physique et exigence). Les mères auraient plus souvent des attitudes défavorables pendant les compétitions (manifestation des émotions, de leur stress), mais aussi le rôle positif de « tampon » entre le père et l’enfant (modérer le parent excessif).

Trois limites à l’investissement parental sont évoquées par les entraîneurs : savoir laisser l’enfant prendre son indépendance au moment adéquat, trouver un juste milieu pour n’être ni sur-, ni sous-impliqué, et répondre aux besoins spécifiques de chaque enfant.

On peut en conclure que les parents ont, par leurs multiples rôles et attitudes, une influence sur la réussite de l’enfant et qu’il est nécessaire de les guider.

Dans l’entraînement de haut niveau, ce travail peut servir de base et fournir des recommandations appliquées aux parents. En pensant aider l’enfant, ils commettent vite des abus divers. Ils ne se rendent pas toujours compte du ressenti de l’enfant et de l’effet de leurs comportements. Il serait nécessaire de les conseiller et orienter pour qu’ils permettent à l’enfant de s’épanouir dans son sport. Pour cela, les entraîneurs sensibilisés aux modalités favorables et défavorables des relations parents/enfant pourraient aider parents et enfants. Ils peuvent détecter les éventuels problèmes ou manques, et intervenir en informant les parents, en leur ouvrant les yeux. Il vaudrait mieux éviter d’écarter les parents gênants pour être tranquille, et plutôt, dans la mesure du possible, instaurer un dialogue, communiquer pour collaborer dans l’objectif de la réussite de l’enfant.

Il faut noter pour finir qu’il est impossible d’établir des règles ou de généraliser les résultats, d’une part parce que le point de vue des entraîneurs est limité (ils n’observent les parents que dans le contexte de la pratique), d’autre part, parce que chaque enfant a des besoins et une personnalité propres, et enfin, parce que chaque relation parents/enfant est unique.

Source primaire

Delforge C et LeScanff C. Rôles et comportements favorables et défavorables des parents pour les jeunes joueurs de tennis. Revue STAPS 2006;73:36-56.

Rédacteur

Catherine Delforge
Docteur STAPS, Centre de recherche en sciences du sport (CRESS)

Éditeur

Chantalle Thépaut-Mathieu
Docteur es sciences, chef du département des sciences du sport, INSEP
http://sciences.campus-insep.com

Mots-clés

Relations parents/enfant, Tennis

Lectures suggérées

Côté J. The influence of the family in the development of talent in sport. The sport psychologist 1999;13:395-417.

Delforge C. Analyse des rôles et comportements des parents et de leurs conséquences pour les joueurs de tennis. Thèse de doctorat, Université de Reims, 2003. Non éditée.

Salmela J et Fournier J. Psychologie du sport : les familles et le sport. Revue STAPS 2004;64.

Sports ciblés

Tennis, sports individuels

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