S446 - En musculation chez la femme, y a-t-il une variation des effets si on commence les séries avec de gros ou de petits groupes musculaires ?

En entraînement sportif de haut niveau, il est intéressant et pertinent de savoir quel ordre ou quelle séquence d’exercices permet de faire le plus de répétitions,  de maximiser les gains et d’optimiser la performance.  On sait qu’il est recommandé que les exercices travaillant les gros groupes musculaires soient effectués en début de séance d’entraînement, parce que cette séquence d’exercices exige l’utilisation d’une plus grande résistance et peut résulter en de meilleurs gains en force musculaire à long terme. Cela s’expliquerait par le fait que la charge totale de la session (répétitions * résistance) serait plus élevée avec un entraînement dans cet ordre qu’avec un entraînement débutant par les exercices impliquant de petits groupes musculaires ou une seule articulation.

Cependant, peu de recherches ont été effectuées sur le cas des femmes et l’incidence de l’ordre des exercices sur le nombre de répétitions. De  plus, nous ne savons pas si ces faits s’appliquent de la même façon que chez les hommes. En effet, il est possible qu’il y ait une différence puisque les femmes possèdent une plus grande quantité de fibres de type I que de fibres de type II A et B. Il serait plausible que celles-ci ressentent moins de fatigue que les hommes lors d’un entraînement progressif, et qu’ainsi le nombre de répétitions d’un exercice ne soit pas affecté par le fait qu’il implique les mêmes groupes musculaires que l’exercice qui le précédait.

Dans le doute, les auteurs ont donc émis l'hypothèse nulle, c'est-à dire que chez les femmes,  peu importe qu'on commence par des exercices avec de gros ou de petits groupes musculaires, il n'y aurait pas de différence dans le nombre de répétitions ou la quantité de travail réalisé à 80% 1-RM, contrairement à ce qui avait été rapporté chez les hommes.

Pour se pencher sur cette question, les chercheurs ont utilisé comme sujets, 23 femmes volontaires âgées d’environ 24 ans et ayant un minimum de 2 ans d’expérience en entraînement en résistance. L’expérimentation s’est faite en 2 phases. Le premier jour, les sujets procédaient à la détermination du 1RM pour 6 exercices différents : leg-press (LP), bench press (BP), leg extension (LE), seated machine shoulder press (SP), leg curl (LC) et seated machine triceps extension (TE) et ce 1RM était re-testé le jour suivant. Les jours 3 et 4 étaient consacrés à l’exécution de l’entraînement en force musculaire, soit l'une ou l'autre des 2 séquences d’exercices possibles. La séquence A (n=12) débutait par des gros groupes musculaires pour se terminer avec les plus petits : BP, SP, TE, LP, LE, LC et la séquence B (n=11) était réalisée dans l’ordre inverse. Les sujets devaient faire 3 séries de chaque exercice avec 2 minutes de repos entre chaque série et exercice jusqu’à épuisement avec une charge de 80% de 1RM. Pour chaque série d’exercices, le nombre de répétitions effectuées était compilé et après chaque séquence d’exercices différents, une note sur l’échelle de perception de l’effort de Borg devait être attribuée, en insistant sur la fatigue musculaire locale.

Quelque soit l'ordre des exercices, on constate que le volume total de la charge (=travail total accompli) ou nombre total de répétitions (A=70.5 et B=70.6) ou moyenne (A=11.7 vs. B+11.8) des répétitions pour tous les groupes musculaires combinés et pour les trois séries est similaire, indiquant que chez les femmes contrairement à ce qui fut rapporté chez les hommes, commencer les séries avec de gros ou de petits groupes musculaires, n'avait pas d'effet global sur le travail total accompli.

D'autre part en regardant, les résultats pour chacun des exercices, on note que pour les deux séquences, il y a diminution semblable du nombre moyen de répétitions pour les trois séries que les exercices précédents impliquent des gros ou de petits groupes musculaires.  Ainsi, si l'on veut améliorer l'endurance des gros groupes musculaires, la séquence B où l'on commence par de gros groupes musculaires, permet de faire un plus grand volume d'entraînement (Figure 1, LE et LC) alors que la séquence A où l'on commence par les petits groupes favorisera l'endurance de ces petits groupes (Figure 1, BP et SP).

En outre, l’étude montre aussi que  la perception d’effort immédiate de chacun des exercices n’est pas influencée par l’ordre de ceux-ci, quand ils sont tous individuellement effectués au maximum possible (dans la phase concentrique) de l’individu.

De façon plus concrète, les résultats de cette étude sont déterminants pour les séances d’entraînement ayant comme objectifs de maximiser la force de muscles spécifiques à un sport donné. La séquence commune d’exercices procédant par les gros groupes musculaires rencontre certainement les objectifs de plusieurs, mais il reste que d’après les données précédentes, on observera forcément une baisse de performance dans l’exercice effectué en dernier et ce pour un petit ou un gros groupe musculaire. Cet effet négatif doit donc être pris en considération lors de la création d’un programme d’entraînement pour des athlètes féminines ou des individus ayant des objectifs de force. Ainsi, si un exercice est prioritaire et important à faire dans un entraînement, peu importe si cela implique un petit ou un gros groupe musculaire, il doit être effectué en début de séance afin que les résultats soient optimaux. Tout ceci est évidemment vrai, que  l’objectif de force soit pour un petit ou un gros muscle.

Cependant, il y a une certaine limite à l’application de ce nouveau principe. Si un individu à besoin prioritairement de certains petits groupes musculaires (pour son sport), il les entraînera en premier dans sa séance et il effectuera donc les autres exercices (gros groupes musculaires) en dernier. Si ceux-ci sont très difficiles parce qu’ils englobent plusieurs grands groupes musculaires et exigent davantage de ceux-ci que les exercices précédents, il y aura alors des risques de blessures. En effet, les muscles auront déjà accumulé beaucoup de fatigue et seront moins frais et disponibles pour ces exercices plus exigeants. Il est également important de noter que la recherche n’a étudié que l’effet aigu de cet entraînement, alors il est difficile de savoir si à long terme, avec les adaptations physiologiques qui s’installeraient, les résultats seraient différents ou si les effets seraient les mêmes.

Figure 1. Moyenne des répétitions pour les trois séries à 80% 1-RM pour chacun des groupes musculaire ainsi que pour tous les groupes combinés.. BP: Bench Press; SP: Shoulder Press; TE: Triceps Extension; LP: Leg Press; LE: Leg Extension; LC: Leg Curl.

Source primaire

Simao R De Tarso Veras Farinatti P. et coll. Influence of Exercise Order on the Number of Repetitions Performed and Perceived Exertion During Resistance Exercise in Women. Journal of Strength and Conditioning Research 2007; 21(1): 23-28.

Rédacteur

Virginie Doyon Barbant, Marilyne Petit
étudiantes 1er cycle en kinésiologie, Université de Montréal

Éditeur

Luc Léger
Ph. D., Professeur au Département de kinésiologie, Université de Montréal

Mots-clés

ordre des exercices, nombre de répétitions, Bas/haut du corps, Pluri/uni articulaire

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Sforzo G.A., P.R. Touey. Manipulating exercise order affects muscular performance during a resistance exercise training session. J. Strength Cond. Res. 1996 ;10 :20-24.

Farinatti P.T.V., R. Simao. et coll. Influence of exercise order on the number of repetitions performed and perceived during resistive exercises. J. Strength Cond. Res. 2005;19:152-156.

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