S475 - Les entraîneurs peuvent contribuer à la prévention de l'épuisement professionnel chez l'athlète

Tout comme dans le monde du travail, les athlètes  aussi souffrent fréquemment de cette forme de dépression sévère qu’est l’épuisement professionnel mais le phénomène n’est pas encore très bien compris.

L’épuisement professionnel est décrit comme un syndrome d’épuisement émotionnel faisant état de  dépersonnalisation (cynisme, perte d’empathie) et d’insatisfactions au niveau de l’accomplissement personnel (Maslach & Jackson, 1984).

Les auteurs de la présente étude ont donc voulu examiner les connaissances et expériences de 13 entraîneurs en natation afin de les comparer  aux définitions académiques et ainsi pouvoir décrire le plus justement possible les signes et symptômes de l’épuisement professionnel chez l’ athlète.

Les chercheurs ont regroupé les résultats obtenus des entrevues semi structurées, sous trois sections : la différenciation des termes « burn-out » et « drop-out », les signes et symptômes de l’épuisement  et les facteurs pouvant le causer ou le prévenir.

Tous les entraîneurs rencontrés ont fait la distinction entre  les termes burn-out et drop-out. Il est donc reconnu qu’un athlète peut abandonner la pratique d’un sport sans qu’il ne souffre nécessairement de dépression, bien que dans les deux cas l’athlète ne semble pas heureux dans la pratique de son sport. L’épuisement, par contre, s’avère être un phénomène beaucoup plus négatif qui amènera des conséquences sur plusieurs sphères de la vie de l’athlète, si ce n’est toutes. De plus, les symptômes sont observables pendant plusieurs mois avant  qu’il n’y ait arrêt de la pratique de l’activité,tranchant ainsi avec l’ investissement personnel antérieur .

Parmi les signes et symptômes de dépression  mentionnés au cours des entrevues, on retrouve le retrait, la perte du sens d’accomplissement personnel, l’épuisement physique et psychologique et la dévaluation du sport.

On observe deux différents types de retrait comme signe précurseur de la dépression : le retrait relié à la tâche et aux entraînements et le retrait social lors  des entraînements. Le retrait relié à la tâche et  aux entraînements se manifeste  entre autre par la distanciation du programme d’entraînement, l’utilisation d’ excuses pour réduire la charge de travail, la diminution d’effort au travail demandé, les retards ou les départs hâtifs ou même les absences des entraînements. Le retrait social fait quant à lui référence à un changement de comportement vis-à-vis des coéquipiers, ce qui causera une distance avec le reste du groupe. L’athlète, par exemple, aura tendance à s’isoler et à diminuer les échanges sociaux avec ses collègues, à cesser de les encourager, à perdre sa jovialité, à devenir fortement centré sur lui-même et à démontrer un comportement agressif et colérique nuisant au bon fonctionnement du groupe lors des pratiques.

La diminution ou perte du sens d’accomplissement personnel, symptôme révélateur de l’émergence d’une dépression s’ explique par une incohérence entre les habiletés physiques et les désirs de l’athlète. Un manque d’amélioration, par exemple, pourrait susciter chez l’athlète des sentiments de frustration et de découragement ainsi qu’une perception de stagnation. Les plateaux dans le rendement en entraînement sont souvent associés à des difficultés psychologiques. L’athlète qui ne s’adapte pas à ce phénomène, se décourage et se frustre en souffrira nécessairement. À travers ce cycle vicieux, l’athlète devenu très émotif et critique en oublie ses véritables objectifs. Pour les entraîneurs interrogés, un tel arrêt de progrès est un signe très significatif de l’épuisement professionnel.?D’autres phénomènes contribuent aussi à réduire le sentiment d’accomplissement personnel, tels qu’avoir des attentes de performance irréalistes, se fixer des buts beaucoup trop élevés et miser sur le résultat plutôt que sur le processus d’atteinte d’objectifs.

Un autre symptôme important est la dévaluation du sport, qui est caractérisée par une attitude de détachement face au sport et aux entraînements. Il n’y a plus de motivation à progresser et à se fixer de nouveaux objectifs. L’athlète peut devenir agressif et aller jusqu’à détester complètement le sport qu’il pratique.

Finalement l’épuisement tant physique que psychologique est un autre signe de la dépression.

Ce qui ressort de la plupart des entrevues d’entraîneurs, c’est que l’épuisement professionnel peut être causé par plusieurs facteurs. D’une part les différentes pressions externes que subit l’athlète peuvent contribuer à la dépression si elles s’avèrent trop fortes. Par exemple, une trop forte pression des parents (ex. : Le parent insatisfait qui a un besoin excessif que son enfant réussisse , qui joue le rôle d’un deuxième entraîneur à la maison ou qui se projette à travers les accomplissements sportifs de son enfant), ou de trop fortes  demandes venant de l’entraîneur, le surentraînement causé par des entraînements trop intenses avec une fatigue constante (manque de repos), la pression de gagner et la pression des amis à l’extérieur du sport qui voudraient voir l’athlète passer plus de temps avec eux  ne sont que des exemples peuvent pousser l’athlète vers la dépression.

Les demandes peuvent aussi venir  de l’individu lui-même et être trop élevées. Par exemple, les jeunes qui sont trop exigeants avec eux-mêmes qui voudraient se voir en faire plus qu’ils ne sont capables, ou ceux qui se comparent sans cesse à leurs collègues et se basent sur la performance des autres pour évaluer leur propre performance, risquent d’avoir de la difficulté à tout supporter.

Finalement la dépression peut aussi être expliquée le sentiment de l’athlète d’être  dans un environnement incontrôlable face à son sport, avec  l’impression de ne pas pouvoir prendre de décisions par lui-même durant les entraînements ou pour la participation aux compétitions.  Il est également mentionné que l’identité propre de l’athlète ainsi que son niveau d’équilibre dans les différentes sphères de sa vie a également une très grande influence sur la façon dont il envisagera les différentes situations.

On pourrait prévenir l’épuisement professionnel à l’aide de quelques éléments clés tels qu’une bonne structure de support disponible pour l’athlète (un bon support venant de l’entraîneur, des parents, des coéquipiers) ainsi qu’un bon programme bien organisé comprenant un environnement d’entraînement encourageant, un programme constamment motivant et un bon suivi des attentes et progression de l’athlète.

Pour conclure, les propos des entraîneurs lors de l’entrevue s’accordent bien avec ce que disent les écrits académiques. Il est donc important que l’entraîneur soit sensible à cette  possibilité qu’est l’épuisement professionnel  qui malheureusement s’avère souvent le responsable de la retraite chez d’excellents athlètes.

Source primaire

Raedeke TD., Lunney K. et coll. Understanding Athlete Burnout: Coach Perspectives.Journal of Sport Behavior 2002 ;25 (2) :181-207.?La source primaire est disponible sur la base de données suivante : Psychology & Behavioral Sciences Collection.

Rédacteur

Émilie Massé
étudiante à la maîtrise en Sciences de l’Activité Physique à l’UQTR

Éditeur

Madeleine Hallé
Institut National du Sport Québec, Montréal

Mots-clés

Épuisement professionnel, athlètes, Natation

Lectures suggérées

Coakley J. Burnout among adolescent athletes : A personal failure or social problem ? Sociology of Sport journal 1992: 9: 271-285.

Maslach C., Schaufeli WB. Historical and conceptual development of burn-out. In WB. Schaufeli, C. Maslach & T. Marek (Eds.), Professional burnout : Recent developments in theory and research 1993; 1-16 Washington, DC : Taylor & Francis

Price MS., Weiss MR. Relationship among coach burnout, coach behaviours and athletes’ psychological responses. The Sport Psychologist, 2000; 14: 391-409.

Cohn PG. An exploratory study on sources of stress and athlete burnout in youth golf. The Sport Psychologist 1990; 4: 95-106.

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