S537 - Les jeux réduits en football : un moyen d'atteindre un niveau d'intensité de travail équivalent aux exercices intermittents de courte durée spécifique

L’analyse des différents facteurs de la performance en football met en évidence l’importance de l’aspect physique au même titre que la technique, la tactique et le psychologique (Dellal et al, 2008). Les entraîneurs doivent optimiser la condition physique des joueurs afin qu’ils puissent exprimer au mieux leurs qualités footballistiques. Durant la période de compétition, les entraîneurs de sports collectifs n’ont pas le temps de développer parfaitement et spécifiquement un facteur de la performance. Nous devons alors trouver des exercices permettant de travailler simultanément plusieurs qualités tout en acceptant que le travail effectué ne soit pas optimal. L’endurance, qualité qui constitue la base du footballeur, est développée ou maintenue au moyen d’exercices intermittents de courtes durées (30 – 30, 15 – 15, 10 – 10, 10 – 20, 5 – 25…). Ce type de travail permettrait de solliciter à la fois la capacité aérobie, de maintenir la VO2max et d’effectuer un travail en explosivité. Nous avons donc un travail physique mixte. Toutefois, certaines méthodes de travail permettraient également de maintenir un niveau d’endurance spécifique au moyen d’exercices intégrés avec ballon.

CADRE THÉORIQUE

Les effets d’un entraînement en endurance au moyen d’exercices intermittents ont été démontrés chez le sportif de haut niveau avec notamment une hausse de la VO2max et une apparition retardée de la fatigue comparativement à un exercice continu. De nombreuses études relataient que cette méthode permettait de limiter la production d’acide lactique et d’augmenter la part d’utilisation des phosphocréatines (PCr) au métabolisme énergétique à l’exercice. Les PCr et le glycogène musculaire sont décrits comme les principaux substrats énergétiques lors d’exercices intermittents. Ces exercices sont intéressants car une capacité aérobie élevée permet aux footballeurs d’améliorer leurs performances grâce à une plus grande participation pendant le match par une hausse de la distance totale parcourue (Wisløff et al, 1998) et de l’intensité de l’activité.

Certains auteurs avaient décrit le football comme un ensemble de phases de jeu à 4 contre 4 ou moins, sur des espaces réduits. Or Hoff et al (2002) montraient qu’un entraînement spécifique à base de jeux réduits (5 vs 5) permettait d’approcher des valeurs de FC équivalentes à celles obtenues lors d’exercices intermittents de courte durée. Une des principales différences entres ces deux méthodes d’entraînement est la présence de la balle lors des jeux réduits et l’obligation de se déplacer par rapport aux adversaires.

CONSÉQUENCES PRATIQUES ET QUESTIONS

Les jeux réduits et les exercices intermittents de courte durée font partie intégrante de tout entraînement du footballeur. Ces deux méthodes de travail sont très souvent différenciées alors qu’elles peuvent agir à un même niveau sur le plan physiologique. Il serait ainsi intéressant de donner des outils scientifiquement valides afin de comparer ces deux méthodes. Un des moyens les plus simples serait d’analyser les réponses cardiaques lors de ces exercices à charges physiques contrôlés (exercices intermittents de courte durée) et lors de ces exercices physiques intégrés (jeux réduits) tout en analysant l’homogénéité inter-sujets.

ÉTUDE

Dix footballeurs de la Ligue 1 française (âge : 26 ± 2,9 ans ; masse corporelle : 78 ± 4,4 kg ; FCmax : 195,4 ± 4,9 bpm ; vVO2max : 17,1 ± 0,8 km.h-1) ont effectué différents exercices intermittents (30 – 30 à récupération active et passive, 15 – 15 à récupération passive, 10 – 10 à récupération passive et 5 – 20 à récupération passive) et différents jeux réduits (1 vs 1, 2 vs 2, 4 vs 4, 8 vs 8 avec et sans gardiens et des 10 vs 10) au cours de leurs périodes de compétition. Lors de chacune de ces méthodes d’entraînements, nous avons relevé la FC au moyen d’un cardiofréquencemètre (Polar S-810, Kempele, Finlande) étalonné battement par battement afin d’analyser la FC de réserve (FCr) selon la formule de Karvonen : FCr = (FC moyenne au cours de l’exercice – FC de repos)/(FCmax – FC de repos) * 100. Cette valeur de FCr, qui sera exprimée en pourcentage (%FCr), permet d’effectuer des comparaisons entre différents joueurs.

RÉSULTATS

Les résultats de cette expérimentation démontrent que le pourcentage moyen de la FC de réserve lors d’exercices intermittents 30 – 30 à 100 % de la vVO2max à récupération active est significativement plus grand (tableau 1) que lors des jeux réduits 1 vs 1 (p < 0.01), 4 vs 4 (p < 0.05), 8 vs 8 (p < 0.001) et 10 vs 10 (p < 0.01). Le 10 – 10 à 110 % de la vVO2max présente une différence significative avec les 1 vs 1 (p < 0.05), 8 vs 8 (p < 0.01) et avec le 10 vs 10 (p < 0.05).

Les réponses cardiaques lors d’exercices intermittents 30 – 30 à 100 % de la vVO2max et d’exercices intermittents 10 – 10 à 110 % de la vVO2max à récupération passive ne présentent aucune différence significative avec l’ensemble des jeux réduits (figure 1) ; tout comme les 2 vs 2 et le 8 vs 8 ne présentent aucune différence significative avec l’ensemble des exercices intermittents (figure 2).?Enfin, l’homogénéité des réponses cardiaques est deux fois moins importante lors des jeux réduits, comparé aux réponses cardiaques durant les exercices intermittents avec respectivement des valeurs moyennes de coefficient de variation inter-sujets de 11,8 % vs 5,9 %.

CONCLUSION

Certains jeux réduits, notamment les 2 vs 2 et les 8 vs 8 avec gardiens, permettraient d’atteindre un niveau de FCr équivalent à celui obtenu au cours d’exercices intermittents de courte durée. Ces jeux réduits peuvent alors être utilisés comme une méthode d’entraînement intégrant l’aspect tactique, l’aspect technique mais aussi l’aspect physique, en approchant des intensités semblables à celles d’exercices intermittents courts (Dellal et al, 2008). Néanmoins, ces jeux réduits présentent une variabilité physiologique plus importante que celle des exercices intermittents et la FC ne serait pas son meilleur indicateur physiologique. Enfin, récemment, Rampinini et al (2007) avait rapporté que les réponses physiologiques durant ces jeux réduits étaient influencées par différents facteurs tels que la taille du terrain, la température extérieure, des changements de directions permanents... Cette forme de travail ne permet pas un contrôle rigoureux de l’activité des joueurs. Ainsi, en accord avec les objectifs de l’entraînement, le coach devra choisir entre un entraînement physique contrôlé (exercices intermittents) et un entraînement physique intégré plus difficilement contrôlable (jeux réduits).

Source primaire

Dellal A, Chamari K, Impellizzeri F, Pintus A, Girard O, Cotte T, Keller D. Heart rate responses during small-sided games and short intermittent running training in elite soccer players: a comparative study. Journal of Strength Conditional Research 2008;22(5):1449-57.

Rédacteur

Alexandre Dellal
doctorant en physiologie de l'exercice, laboratoire de psychophysiologie du comportement moteur et des sports, Strasbourg (France), unité de recherche « Évaluation, Sport, Santé », Centre national de la médecine et des sciences du sport, Tunis (Tunis

Éditeur

Chantalle Mathieu

Mots-clés

Jeux réduits, exercice intermittent course de courte durée, entraînement physique intégré, footballeurs de haut niveau

Lectures suggérées

Dellal A et coll. De l’entraînement à la performance en football. Editions De Boeck, coll. « Sciences et pratiques du sport », 2008.

Hoff J, Wisløff U & al. Soccer specific aerobic endurance training. British Journal of Sports Medicine 2002;36:218-221.

Rampinini E, Impellizzeri FM & al. Factors influencing physiological responses to small-sided soccer games. Journal of Sports Sciences 2007;25(6):659-666.

Wisløff U, Helgerud J & al. Strength and endurance of elite soccer players. Medicine Science in Sports and Exercise 1998;30:462-467.

Sports ciblés

Football et sports collectifs

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