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S12 - Le choix de la fréquence de manivellage a des conséquences sur l'estimation de la VO2max

Dans les activités cycliques de locomotion (cyclisme, course à pied, kayak), la consommation maximale d’oxygène (VO2max) est l’un des principaux facteurs de la performance sur moyenne et longue distance. Déterminé à l’aide d’un protocole d’intensité croissante, cet indice est pertinent si le type d’exercice utilisé pour évaluer l’athlète sollicite les masses musculaires identiques à celles qui sont engagées dans la discipline pratiquée. C’est pourquoi, l’utilisation « d’ergomètres à bras » est particulièrement appropriée à l’évaluation des athlètes spécialistes d’activités sollicitant les membres supérieurs (kayakistes, nageurs). Sur le plan méthodologique, le principal critère d’atteinte de VO2max est l’observation d’un plateau de consommation lorsque la puissance d’exercice est augmentée. Cependant, ce plateau est rarement observé pour les exercices réalisés avec de faibles masses musculaires comme ceux réalisés avec les membres supérieurs ; on parle plutôt de valeur pic de la consommation d’oxygène (VO2pic). Plusieurs facteurs sont alors capables d’influencer la valeur de VO2pic. Parmi les facteurs caractérisant le patron locomoteur du pédalage de bras (exercice de manivellage), l’influence de la cadence sur la détermination de VO2pic a fait l’objet de l’étude présentée par l’article de Smith et al. (2001).

Sur ergomètre à frein électromagnétique spécialement adapté aux exercices des membres supérieurs, 20 sujets masculins ont réalisé 3 tests d’intensité croissante (incrément de 20 Watts toutes les 2 minutes). L’ergomètre permettait d’imposer une puissance indépendamment de la cadence utilisée. Les trois tests étaient réalisés à différentes cadences [60, 70 et 80 cycles. min-1 (cpm)] imposées dans un ordre aléatoire.

Les résultats montrent que la puissance maximale atteinte en fin de test est plus importante à 80 cpm (159 ± 25 W) qu’à 60 et 70 cpm (respectivement 147 ± 23 et 152 ± 25 W). Les valeurs moyennes de VO2pic et FCmax obtenues à 70 et 80 cpm (3,19 ± 0,55 et 3,23 ± 0,54 l. min-1 pour VO2pic et 182 ± 10 bpm pour FCmax) sont plus élevées qu’à 60 cpm (3,01 ± 0,57 l. min-1 pour VO2pic et 176 bpm pour FCmax).

Cette étude est la première à montrer aussi catégoriquement l’effet de la cadence sur la valeur de VO2pic déterminée lors d’un exercice de manivellage. En s’appuyant sur d’autres résultats obtenus en cyclisme, ces auteurs supposent que le retard de l’arrêt de l’exercice et l’obtention de puissances plus importantes aux cadences élevées pourraient s’expliquer par une moindre fatigue neuromusculaire. Par ailleurs, l’obtention de valeurs de VO2pic plus élevées à 70 et 80 cpm résulterait d’une adaptation hémodynamique facilitée aux cadences élevées (i.e., meilleure perfusion du muscle favorisant l’apport en O2 au niveau des cellules musculaires). En effet, par comparaison avec un exercice sollicitant une importante masse musculaire, certains auteurs (Foley et al., 1983) suggèrent que la tension musculaire développée par chacun des muscles impliqués lors d’un exercice de manivellage est plus proche de la tension musculaire maximale étant donnée la faible masse musculaire mise en jeu. Cette différence pourrait être à l’origine d’une occlusion vasculaire plus importante pour ce type d’exercice. Les auteurs de cet article pensent que l’utilisation d’une cadence élevée permettrait d’atténuer l’importance de ce phénomène. En effet, de précédents résultats (Hagberg et al., 1981) montrent pour un exercice de cyclisme réalisé à puissance mécanique constante, que la force appliquée sur les pédales est moindre aux cadences élevées (90 cpm). Dans le cadre d’un exercice de manivellage réalisé à cadence élevée, une moindre tension musculaire pourrait alors induire une diminution des résistances vasculaires et ainsi permettre une meilleure perfusion du muscle (Gotshall et al., 1996). L’augmentation de l’apport en O2 qui en résulte expliquerait les valeurs de VO2pic plus élevées obtenues à 70 et 80 cpm comparativement à 60 cpm.

Quoiqu’il en soit, même si les mécanismes rendant compte de ce phénomène ne sont qu’hypothétiques, il n’en demeure pas moins que les résultats présentés soulignent à quel point il est important de prendre en considération la cadence utilisée lors de l’évaluation des athlètes, et plus particulièrement dans le cadre du suivi de l’entraînement (i.e. nécessaire reproductibilité de la cadence adoptée lors de la première évaluation).

Source primaire

The influence of crank rate on peak oxygen consumption during arm ergometry Smith P.-M., Price M.-J., Doherty M Journal of Sports Sciences. 19 : 955-960, 2001.

Rédacteur

Jean-Michel Leveque
Docteur en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives. Laboratoire de biomécanique et de Physiologie, INSEP

Éditeur

Christine Hanon
Docteur et responsable de laboratoire au département des sciences du sport de l’INSEP

Mots-clés

Membre supérieurs, pédalage, puissance maximale, Aérobie, préparation à la performance

Lectures suggérées

Sawka M.-N., Foley M.-E., Pimental N.-A., Toner M.-M., Pandolf K.-B. Determination of maximal aerobic power during upper-body exercise. J. Appl. Physiol. 54 : 113-117, 1983.

Hagberg J.-M., Mullin J.-P., Giese M.-D., Spitznagel- E. Effects of pedalling rate on submaximal exercise responses of competitive cyclists. J. App. Physiol. 51 : 447-451, 1981.

Gotshall R.-W., Bauer T.-A., Fahrner S.-L. Cycling cadence alters exercise hemodynamics. Int. J. Sports Med. 17 : 17-21, 1996.

Sports ciblés

Activités cycliques de locomotion sollicitant les membres supérieurs

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