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S214 - Peut-on en même temps développer les qualités de force et d’endurance?

Dans le but de déterminer si des entraînements de force et d’endurance induisent des résultats antagonistes, une expérimentation a été menée afin d’évaluer les effets physiologiques de différents programmes d’entraînement.

ENTRAÎNEMENT

45 personnes ont été réparties dans 4 groupes, dont 3 groupes d’entraînement d’une durée de 12 semaines.

groupe " F " : entraînement de force (3 fois/semaine) sollicitant les principaux groupes musculaires des membres inférieurs et supérieurs. L’intensité des exercices augmentait au cours des semaines (de 72 à 84% de 1RM), ainsi que le volume (de 2 à 6 séries de 4 à 12 répétitions).

groupe " E " : entraînement d’endurance comprenant un exercice de pédalage de 30 à 42 min à une intensité correspondant à la puissance développée au seuil ventilatoire (2 fois/semaine), et un exercice intermittent de 4, puis 7 séquences (3min./3min.) (puissance de l’exercice à 90% de la VO2max) (1 fois/semaine).

groupe " F+E " : entraînement cumulant les 2 programmes " F " et " E " (3+3 entraînements/semaine)

groupe C : contrôle, sans entraînement.

TESTS

Les effets de ces entraînements ont été caractérisés par différents paramètres d’ordre :

- biomécanique: force maximale lors de l’extension uni- ou bi-latérale des membres inférieurs;
- structural : surface de section des fibres I et II;
- métabolique :VO2max

Enzymes du métabolisme musculaire :

- mATPase (Adenosine Triphosphatase Myofibrillaire) : reflet de la capacité contractile,
- aGPD (aGlycerol Phosphate Dehydrogénase) : enzyme du métabolisme glycolytique anaérobie,
- SDH (Succinate Dehydrogénase) : enzyme du métabolisme oxydatif.

RÉSULTATS

Les variations de ces différents paramètres avant et après la période de 12 semaines figurent dans le Tableau.

D’après ces résultats, il apparaît qu’un entraînement combiné " F+E " peut aboutir à une amélioration des deux principaux aspects de la performance : la force et l’endurance. Toutefois, les résultats obtenus par ce groupe " F+E ", qui a subi l’ensemble des 2 entraînements, ne représentent pas strictement l’addition des bénéfices obtenus par les groupes " F " et " E ".

Les capacités de force maximale, à la suite de l’entraînement " F+E ", sont augmentées à la fois lors d’extensions du genou uni- et bi-latérales. Lors du mouvement bilatéral, les gains de force maximale sont identiques pour le groupe " F " et " F+E ". Des adaptations neurophysiologiques pourraient être à l’origine de ces modifications puisque ce type de mouvement complexe sollicite des coordinations pluri-articulaires (CHILIBECK et al, 1998). Les gains de force obtenus dans le cadre de ces adaptations neurophysiologiques sont préférentiellement observables dans des mouvements pratiqués à l’entraînement : ils sont spécifiques aux conditions d’entraînement. Lors du mouvement unilatéral, les gains de force maximale sont supérieurs pour le groupe " F " comparé au groupe " F+E ". Cette différence peut être attribuée à l’hypertrophie musculaire et à l’augmentation de l’activité de la mATPase induites par l’entraînement " F ". L’entraînement " F " induit donc des adaptations d’ordre neurophysiologique, ainsi que des transformations d’ordre structural et enzymatique, favorables à l’expression de la force. Concernant le groupe " F+E ", l’entraînement d’endurance surajouté à l’entraînement de force limiterait ces adaptations, et donc, la capacité de force maximale dans les mouvements unilatéraux.

Les capacités d’endurance sont améliorées à l’issue des entraînements " F+E " et "E ". En effet, ces 2 groupes augmentent de manière comparable leur valeur de O2max, ainsi que l’activité enzymatique de la SDH (conditions favorables à l’expression des capacités d’endurance). Notons que le groupe " F+E " bénéficie, en outre, d’un développement de la vascularisation musculaire. Cependant, cette amélioration des capacités d’endurance ne doit pas être uniquement imputée aux caractéristiques particulières de cet entraînement combiné, mais la quantité d’entraînement qu’il représente doit également être prise en compte. N’oublions pas que l’entraînement " F+E " correspondait à une séance par jour, alors que les sujets des autres groupes effectuaient une séance tous les deux jours uniquement.

CONCLUSION

Il apparaît donc que des gains concomitants de force et d’endurance peuvent être obtenus à l’issue d’un entraînement combiné. L’amélioration des capacités d’endurance ne semble pas altérée lorsqu’une composante de renforcement musculaire est ajoutée à l’entraînement d’endurance. À l’inverse, l’amélioration des capacités de force est réduite si un entraînement d’endurance est ajouté à celui de force. Ce " manque à gagner " semble en partie imputable à la difficulté d’induire de l’hypertrophie en cas d’entraînement combiné. Autrement dit, les gains de force sont spécifiques aux conditions d’entraînement. Il convient donc de retenir dans le cadre d’entraînement combiné, des exercices de musculation qui requièrent des mises en jeu musculaires proches de l’activité sportive. Ce type d’entraînement est particulièrement intéressant pour toutes les disciplines soumises à deux contraintes :

- « l’économie » de l’activité requiert un poids de corps minimal (disciplines autopropulsées),
- la performance requiert à la fois des qualités importantes d’endurance et de force musculaire (ex : demi-fond).

Source primaire

Effect of concurrent strength and endurance training on skeletal muscle properties and hormone concentrations in humans BELL G.J., SYROTUIK D., MARTIN T.P., Burnham R. QUINCY, H.A. European. Journal.Applied. of Physiology 2000, 81,418-427.

Rédacteur

Chantalle THEPAUT-MATHIEU
Doctorat es sciences. Chef du Département des Sciences du Sport (INSEP)

Éditeur

Anne Michaut
Docteur en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives.

Mots-clés

Effet de l'entraînement, endurance, fibre musculaire, force musculation, métabolisme, musculation, plan d'entraînement

Lectures suggérées

CHILIBECK P.D., CALDEN A.W., SALE D.G., WEBBER C.E A comparison of strength and muscle mass increase during resistance training in young women. European Journal Applied Physiology 77 : 170-175 (1998).

JENSSEN J., JACOBSEN S.T., HETLAND S., TVEIT P. Effect of combined endurance, strength and sprint training on maximal oxygen uptake, isometric strength and performance in female elite handball players during a season Int. J. Sports Med 18 : 354-358 (1997).

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