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S519 - La compétition entre frères ou soeurs peut favoriser le développement et maintenir une relation compétitive saine

En compétition et en entraînement sportif de haut niveau, il est raisonnable de penser que les relations interpersonnelles développées entre coéquipiers influencent la dynamique de groupe et simultanément la performance ainsi que le développement de l’athlète. Cette dynamique entre athlètes devient encore plus intéressante lorsque deux athlètes sont à la fois des partenaires d’entraînement et de fervents compétiteurs lors d’événements sportifs à grande envergure. Telle question est pertinente à explorer puisque la relation entre deux amis athlètes est à la fois une source de provision sociale au sein d’un groupe et une rivalité ardente. 

On sait qu’il existe six sources sociales nécessaires au développement d’un individu au sein d’un groupe. Ces provisions sociales sont a) l’attachement – l’affection, la sécurité et un sens d’identité, b) l’intégration sociale – le partage d’expériences et d’inquiétudes, c) l’éducation – le sentiment d’être pris en charge, d) la valorisation – la confirmation de ses compétences, e) l’alliance fiable – l’existence d’un lien mutuel malgré la présence ou non d’affection, f) le guide – le soutien et des conseils (Weiss, 1974). Toutefois, on ne sait pas comment le niveau de compétition entre deux amis-athlètes peut changer la dynamique de cette relation. En effet, on se doute que la compétition crée une rivalité élevée, mais on ne connaît pas exactement les facteurs psychologiques associés à cette relation compétitive. 

Cette rivalité-alliance entre deux individus est encore plus visible lorsque deux membres de la famille pratiquent le même sport. Par exemple, cet antagonisme est encore plus fort entre frères ou sœurs. Lorsque deux sœurs doivent compétitionner pour le même titre,  cette énergie à vaincre devient à double sens. Non seulement, ce combat est significatif sur la scène sportive, mais aussi sur la scène familiale. Ainsi, les frères et sœurs deviennent à la fois les meilleurs alliés…ou les pires ennemis. De plus, la rivalité s’accentue lorsque les médias et l’entourage profitent de cet élément accrocheur pour ajouter de l’ampleur à la situation déjà bien garnie. On peut penser aux sœurs Venus et Serena Williams en Tennis, les frères Schumacher en F1, ou à Peyton et Eli Manning au football américain. (http://www.linternaute.com/sport/magazine/dossier/champions-freres-et-soeurs/index.shtml).

Pour se pencher sur cette question, on a mené une étude sur les facteurs psychologiques associés à la compétition entre frères ou sœurs. Dix athlètes de haut niveau ont été interviewés sur leurs expériences et perceptions face aux différences et similarités présentes entre la compétition impliquant leurs frères ou sœurs et celle sans cette dynamique familiale. Huit participants sur dix ont déclaré que la compétition entre frères ou sœurs est tout à fait différente. Les principales différences se manifestent en trois thèmes : la réaction affective en compétition (ex, l’augmentation de l’anxiété), le niveau d’engagement émotionnel (ex, un regard positif envers les sentiments du frère ou de la sœur) et la coopération entre frères et sœurs (ex, un support émotionnel et instructif mutuel). Ainsi, on peut conclure que le désir de vaincre et le respect particulier pour son adversaire s’avèrent une source de dépassement de soi incontournable. De plus, cette rivalité-alliance entre frères ou sœurs répond aussi aux besoins sociaux nécessaires pour le développement de l’individu au sein d’un groupe. Cela signifie que la dualité entre frères ou sœurs en compétition est paradoxale de par sa nature puisqu’elle apporte à la fois la présence de rivalité et le sentiment de confort.

En entraînement sportif de haut niveau, la nature multifonctionnelle de la relation frères ou sœurs s’avère un aspect important à comprendre pour ainsi aider à entretenir une dynamique saine entre les deux parties. Bien souvent, la personnalité des individus et surtout leur capacité à gérer ou non leur stress face à l’importante demande impliquée dans une compétition frères ou sœurs seront les points déterminants au développement et au succès de ces alliés rivaux. Ainsi, il est favorable de créer des moments pour permettre aux deux athlètes de discuter ouvertement de leurs perceptions face à cette rivalité. Plus on maintiendra la communication affirmative, plus il sera facile d’éviter les conflits créés bien souvent par des non-dits et par le sentiment d’être incompris. De plus, il faut leur donner des outils pour gérer leur stress et pour se sentir plus en contrôle de la situation. Par exemple, il est suggéré de pratiquer des techniques de régulation de soi telles la respiration et le contrôle de ses tensions musculaires afin de gérer le stress se manifestant de manière physique (ex. moiteur des mains, battements de cœur rapide).  Si le stress se manifeste sur le plan mental (ex, anticipation et rumination dans les pensées), on encourage l’athlète à rester et méditer sur le moment présent, à se concentrer sur des gestes techniques plutôt qu’à des pensés négatives néfastes aux résultats. Finalement, pourquoi ne pas s’encourager mutuellement entre frères ou sœurs, après tout le partage de stress est beaucoup moins accaparant et permettra aux deux athlètes d’exhiber leur potentiel maximal.

Source primaire

Davis, N. W. Martin & Meyer B. B. (2008).When sibling becomes competitor: A qualitative investigation of same-sex sibling. Journal of Applied Sport Psychology, 20, 220-235.

Rédacteur

Catherine Duchesne
consultante en psychologie du sport

Éditeur

André Fournier
directeur INS Québec - Montréal

Mots-clés

Relation interpersonnelle, dynamique familiale, émotion

Lectures suggérées

Weiss, R. S. (1974). The provisions of social relationships. In Z. Rubin (Ed), Doing unto others. Englewood Cliffs, NJ: Prentice-Hall.

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