S550 - Mieux comprendre l'abandon et l'engagement prolongé des adolescents dans le sport de haut niveau
Dans le sport de haut niveau, l’entraînement à la performance est une pratique courante pour les jeunes athlètes. On appelle cette méthode d’entraînement, la pratique délibérée. Avant d’atteindre cet encadrement à forte exigence, l’enfant a évolué à travers 3 étapes de développement : le stade d’initiation, le stade de développement et le stade de perfectionnement. À chaque étape, l’entraîneur remplit des rôles fondamentaux au développement de l’athlète. Plus précisément, au stade d’initiation (athlètes âgés entre 6-12 ans) l’entraîneur fournit un encadrement, une structure qui va permettre à l’enfant de prendre plaisir à la pratique du sport. Si la valeur fondamentale du plaisir par le sport a été transmise, l’athlète évoluera progressivement vers une structure à développement plus spécifique. À ce stade de développement, l’entraîneur met l’emphase sur l’évolution des fondements techniques et tactiques du jeu, ainsi que sur l’effort et la discipline nécessaires pour s’accomplir et avoir du succès. À 13-15 ans, le jeune athlète a une idée bien claire que la performance fait parti du sport. Si le talent de l’athlète est bien développé, on les voit ensuite franchir le stade de perfectionnement qui s’appuie sur la pratique délibérée. Les structures qui soutiennent cet encadrement (ex. centres nationaux de haute performance) orientent principalement les athlètes vers l’amélioration et l’atteinte des performances. À ce stade, l’entraîneur est perçu comme un mentor et un expert dans le milieu sportif. L’athlète investit temps, effort, et énergie au sport qui domine sa vie au quotidien. Malgré cette structure bien organisée, on sait qu’en moyenne 2 athlètes sur 3 abandonnent à chaque année la pratique du sport de haut niveau, entre l’âge de 7 et 18 ans (Petlichkoff, 1996). L’abandon se manifestant particulièrement vers la période de l’adolescence avancée.
Pour analyser cette réalité d’abandon, un groupe de chercheurs a développé un modèle permettant d’étudier les facteurs qui influencent la pratique et le développement sportif. Pour mieux connaître l’influence des méthodes d’entraînement et de l’environnement sur le développement de l’athlète, Fraser-Thomas, Côté et Deakin (2008) ont interviewé 10 nageurs qui avaient abandonné la natation ainsi que 10 nageurs encore engagés dans la pratique de haut niveau. Les adolescents-participants ont répondu à une série de questions portant sur leur expérience sportive, surtout en ce qui a trait aux méthodes d’entraînement et aux rôles des personnes de leur entourage immédiat (coach, familles et amis). Les résultats démontrent que les 2 groupes ont vécu des expériences similaires (ex. entraînement matinal, soutient et manque de soutient provenant du coach). Par contre, seuls les anciens nageurs de haut niveau ont souligné l’expérience hâtive des performances optimales, les interventions d’un entraîneur trop souvent limités à certains individus, la pression parentale durant l’adolescence, un manque d’amis proches dans leur groupe de nageurs et une rivalité entre frère ou sœur. De l’autre côté, seuls les nageurs actifs ont parlé du développement philosophique de leur club (ex. une approche favorisant le développement de l’individu athlète), d’une communication ouverte avec leurs parents et entraineurs, de leurs amis soutenants dans le milieu scolaire ainsi qu’une relation positive avec leur frère ou sœur.
On peut conclure que les méthodes d’entraînement proposées aux jeunes athlètes, ainsi que l’influence de leur entourage immédiat ont une énorme portée sur le développement de l’individu-athlète. Les relations interpersonnelles étant particulièrement fragiles durant l’adolescence, il est nécessaire que l’entraîneur y accorde une attention particulière. Par exemple, éviter des comportements qui démontrent un favoritisme envers certains athlètes et qui ignorent les athlètes plus faibles. De plus, une attitude qui favorise pour tous des feedbacks individuel, contribuera au développement de l’athlète. Une communication ouverte, entre autres, sur le sujet de l’abandon au sport éliminera les tensions. L’encadrement devrait être assuré par une équipe d’entraîneurs à personnalités complémentaires. L’entraîneur a tellement de rôles à remplir qu’il est irréaliste pour une seule personne de répondre à tous les besoins de l’athlète. C’est pourquoi qu’il est important de reconnaître l’influence de notre personnalité sur les athlètes et de s’entourer d’une équipe de travail présentant des rôles et des tempéraments complémentaires. Cette complémentarité va créer un équilibre à différents niveaux, par exemple dans la manière de communiquer et d’interagir avec l’athlète. Ainsi, l’athlète sera porté à communiquer davantage s’il est en pleine remise en question sur la pratique de son sport, qui était au tout début, une source de plaisir et de sentiment d’accomplissement.
Source primaire
Fraser-Thomas J., Côté J. & Deakin J. (2008). Understanding dropout and prolonged engagement in adolescent competitive sport. Psychology of Sport and Exercice, 9, 645-662.
Rédacteur
Catherine Duchesne
consultante en psychologie du sport
Éditeur
André Fournier
directeur INS Québec - Montréal
Mots-clés
Développement de talent, environnement, participation
Lectures suggérées
Petlichkoff, L. M. (1996). The dropout dilemma in youth sports. In O. Bar-Or (Ed). The Child and adolescent athlete: Encyclodedia of sport medecine, 6, 418-432.