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S838 - Augmenter la charge d’entraînement avant une période d’affûtage peut en maximiser les effets

L’un des éléments clés du sport d’aujourd’hui est la modulation de la charge d’entraînement dans les semaines ou les mois précédant la ou les compétitions importantes. L’affûtage, ou réduction de la charge d’entraînement dans les derniers jours précédant l’épreuve, a pour but de réduire la fatigue physique et psychologique et d’optimiser la performance. Une méta-analyse effectuée en 2007 a permis de cerner les caractéristiques d’un affûtage efficace :
• une durée de deux semaines;
• une réduction exponentielle du volume d’entraînement de 40 % à 60 %,
• le maintien de l’intensité de l’entraînement,
• le maintien de la fréquence des séances d’entraînement.

Augmenter la charge d’entraînement les semaines précédant la période d’affûtage est une pratique courante. On ignore cependant comment cette augmentation influe sur l’efficacité de l’affûtage. Des modélisations mathématiques suggèrent qu’une augmentation de la charge d’entraînement préaffûtage d’environ 20 % par rapport à l’entraînement habituel maximise les effets de l’affûtage. Cependant, dans les quelques études où l’on a comparé l’efficacité de l’affûtage, précédé ou non d’une période de surcharge d’entraînement importante, les résultats étaient contradictoires.

L’objectif de la présente étude était donc de comparer, chez des triathloniens, l’effet d’une augmentation de 30 % de la charge d’entraînement durant trois semaines, par rapport au maintien d’un volume d’entraînement normal, sur l’amélioration de la performance après une période d’affûtage de quatre semaines. Parce qu’ils s’attendaient à ce que certains athlètes soumis à la surcharge d’entraînement souffrent de surentraînement, et d’autres non, les chercheurs ont également évalué l’effet de la présence ou non d’un état de surentraînement sur la surcompensation associée à l’affûtage.

Méthodologie

Des 40 triathloniens (performance entre 2 h 00 min et 2 h 20 min au triathlon de distance olympique) qui ont participé à l’étude, 28 ont été assignés au groupe expérimental (surcharge d’entraînement de 30 %) et 12 au groupe témoin (volume d’entraînement habituel). L’étude de 11 semaines comportait quatre phases (voir schéma) :
• phase 1 : durant trois semaines, les sujets des deux groupes ont continué leur entraînement habituel (charge inchangée);
• phase 2 : période d’affûtage d’une semaine, au cours de laquelle leur charge d’entraînement globale a été réduite d’environ 30 %, mais l’intensité maintenue;
• phase 3 : les trois semaines suivantes, le groupe témoin a repris l’entraînement habituel, alors que la charge d’entraînement du groupe expérimental était 30 % supérieure à celle de son niveau habituel (ex. une séance de 60 minutes incluant 10 fractions d’effort de 400 m à vitesse aérobie maximale devenait une séance de 80 minutes avec 13 fractions d’effort de 400 m à vitesse aérobie maximale);
• phase 4 : période d’affûtage de quatre semaines pour les sujets des deux groupes; chaque semaine, la charge d’entraînement a été réduite de 40 % par rapport à la charge habituelle.

La performance a été évaluée à l’aide d’un test de VO2max sur ergocycle : après la première période d’affûtage (phase 2), après les trois semaines d’entraînement habituel ou avec surcharge (phase 3), puis à la fin de chacune des quatre semaines de la période d’affûtage (phase 4). L’indice de performance était la puissance maximale aérobie (PMA), c’est-à-dire la puissance maximale atteinte à la fin du test progressif et maximal d’évaluation du VO2max (puissance augmentée de 25 watts par palier de deux minutes).


SCHÉMA DE LA CHARGE D'ENTRAÎNEMENT DES SUJETS DU GROUPE TÉMOIN ET DU GROUPE EXPÉRIMENTAL DURANT LES 11 SEMAINES DE L'ÉTUDE
Voir fiche 1: http://207.253.82.4/images/S838_figure1.doc


Résultats

Dix sujets du groupe témoin et 23 du groupe expérimental ont complété l’étude. Dans le groupe expérimental :
• 10 des 23 participants ont vécu un surentraînement fonctionnel (diminution de la performance et de l’indice d’énergie, et augmentation de la fatigue perçue) durant la période d’augmentation de 30 % de la charge d’entraînement, laquelle a été suivie d’une surcompensation dans la phase d’affûtage;
• l’un des participants a subi les conséquences d’un surentraînement non fonctionnel, sans surcompensation après l’affûtage, et a été exclu de l’analyse;
• les 12 derniers sujets n’ont pas subi les effets d’un surentraînement et ont conservé leur niveau de performance durant la période de surcharge, malgré une augmentation de la fatigue.

L’effet de l’affûtage a été examiné chez :
• les sujets du groupe expérimental, soit les 10 ayant vécu un surentraînement fonctionnel (SF) et les 12 qui y ont échappé (nSF);
• les 10 sujets du groupe témoin.

Dix participants ont rapporté des épisodes d’infection ou d’inconfort gastro-intestinaux, sept dans le groupe SF, deux dans le groupe nSF et un dans le groupe témoin.

Période de surcharge d’entraînement (phase 3)

Durant la période où la charge d’entraînement du groupe expérimental a augmenté de 30 %, la PMA (puissance maximale aérobie) des sujets SF a diminué de 2,4 %, alors que celle des sujets nSF a augmenté de 1,9 %. La PMA des sujets du groupe témoin n’a pas changé (rappelons qu’ils avaient repris leur entraînement habituel).

Période d’affûtage (phases 2 et 4)

Les sujets du groupe témoin ont amélioré leur PMA à la suite d’une semaine d’affûtage (phase 2), mais pas après deux, trois et quatre semaines d’affûtage (phase 4).

Chez les sujets nSF, l’amélioration de la PMA après l’affûtage allait de légère à élevée après une et trois semaines, et d’élevée à très élevée après deux semaines. Chez les sujets SF, l’amélioration de la PMA était légère ou moyenne après une et après deux semaines d’affûtage, et incertaine après trois et après quatre semaines.

Globalement, l’amélioration de la PMA observée chez les sujets nSF (5,4 ± 2,1 %) était supérieure à celle des sujets SF et du groupe témoin. Dans chacun des groupes, la majorité des sujets ont atteint leur performance de pointe durant les deux premières semaines d’affûtage.

Cette étude indique donc que :
1. une surcharge d’entraînement de trois semaines qui n’induit pas de surentraînement s’accompagne d’une augmentation supérieure de la performance après une période d’affûtage;
2. la surcompensation découlant de l’affûtage n’est pas retardée par une période de surcharge avant l’affûtage (effet maximal durant les deux premières semaines);
3. une surcharge d’entraînement de trois semaines s’accompagne d’un risque élevé de surentraînement;
4. le surentraînement est associé à une faible surcompensation avec l’affûtage, et à une augmentation des risques de contracter une infection.

En somme, augmenter la charge d’entraînement avant une période d’affûtage peut en maximiser les effets, à condition que cette charge accrue n’engendre pas de surentraînement. L’étude souligne aussi l’importance de surveiller attentivement l’apparition de signes de surentraînement, afin d’ajuster la charge d’entraînement. D’autres études seront requises pour trouver quelles seraient la durée et l’importance de la surcharge temporaire qui permettrait de maximiser la surcompensation.

Source primaire

Aubry A et coll. (2014) Functional overreaching: The key to peak performance during the taper? Med Sci Sports Exerc 46(9):1769-77.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25134000

Rédacteur

Myriam Paquette
B.Sc., étudiante à la maîtrise en physiologie de l’exercice

Éditeur

Guy Thibault
Ph. D., Direction du sport et de l’activité physique, gouvernement du Québec; Département de kinésiologie de l’Université de Montréal; et INS Québec

Mots-clés

Affûtage, surentraînement

Lectures suggérées

Bosquet L et coll. (2007) Effects of tapering on performance: A meta-analysis. Med Sci Sports Exerc 39(8):1358-65.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17762369

Coutts AJ et coll. (2007) Practical tests for monitoring performance, fatigue and recovery in triathletes. J Sci Med Sport 10(6):372-81.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17466593

Le Meur Y et coll. (2013) Evidence of parasympathetic hyperactivity in functionnaly overreached athletes. Med Sci Sports Exerc 45(11):2061-71.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24136138

Mujika I (2009) Tapering and peaking for optimal performance. Human Kinetics, 224 pages.
www.humankinetics.com/products/all-products/tapering-and-peaking-for-optimal-performance

Thomas L et TA Busso (2005) A theoretical study of taper characteristics to optimize performance. Med Sci Sports Exerc 37(9):1615-21.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16177616

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