Dans l'entraînement sportif de haut niveau se pose la question de la détection des talents, et des critères pertinents d'évaluation de la performance et de différenciation entre athlètes élites et amateurs. Comment choisir ceux qui émergent par rapport à « la masse », sur quels critères se baser ? Comment évaluer leur pertinence ? Quels tests mettre en place ? En handball, un certain nombre d'études ont montré que des niveaux élevés de force et de puissance musculaire, ainsi qu'une capacité aérobie élevée, constituaient des facteurs importants de la performance.

Mais très peu d'études se sont intéressées à comparer des caractéristiques anthropométriques et physiologiques entre des joueurs de handball de différents niveaux d’expertise. Ainsi, l'établissement d'un « profil de forme physique » du handballeur de haut niveau pourrait s'avérer utile pour construire de manière optimale des programmes d'entraînement de la force, de la puissance et de l'endurance musculaire, en vue, d'une part, de tenter d'atteindre ce « profil type« » du handballeur élite, et d'autre part, d'améliorer la performance en handball.

En ce sens, l'étude de Gorostiaga et coll. (2004) a montré qu'en termes de qualités physiques, l'explosivité, l'endurance et la vitesse de course ne permettent pas de différencier des handballeurs de niveaux d'expertise différents (15 joueurs d'une équipe nationale parmi les meilleures mondiales vs 15 joueurs de deuxième division espagnole). Par ailleurs, les handballeurs élites ne sont ni plus grands ni plus maigres que les joueurs de niveaux inférieurs. Dans un souci de clarté, les paramètres physiologiques et anthropométriques retenus dans cette étude pour tenter de différencier handballeurs élites et amateurs sont reportés dans le tableau 1.

Ces résultats permettent de souligner que certaines qualités physiques constituent des déterminants de la performance en handball, à savoir : la force maximale des membres supérieurs, la vitesse d'exécution lors du tir, et les puissances des membres supérieurs et inférieurs, qui sont toutes significativement supérieures chez les handballeurs élites. Ces différences permettent aux joueurs élites, d'une part, de soutenir les fortes contractions musculaires exigées lors de certaines actions de jeu (bloquer l'adversaire, le repousser, le tenir, etc.), et d'autre part, d'être plus puissants lors des nombreuses actions de contact avec l'adversaire.

Cela signifie que certaines qualités physiques constituent des critères pertinents pour différencier des joueurs de différents niveaux. Ces résultats peuvent ensuite être utilisés par l'entraîneur, soit dans un but de détection, soit dans un but de sélection pour repérer et choisir les joueurs qui présentent un profil proche de celui du handballeur élite, c'est-à-dire ceux qui seront le plus à même de répondre de manière optimale aux sollicitations imposées lors d'un match de handball (cf. figure 1 : https://notyss.com/savoirsport/downloadfile?id=271&fichier=S452_tableau1.doc ).

Ce graphique est une interprétation personnelle des principaux résultats ayant trait aux paramètres musculaires que Gorostiaga et coll. (2004) ont mis en évidence dans cette étude, qui prend appui sur le modèle utilisé par Mazo, Cazorla et coll. (2001) pour établir le profil physiologique de joueurs de rugby. L'importance relative de ces différents paramètres permet d'établir un « profil type » du handballeur élite : le joueur élite de handball n'est pas forcément le plus grand, le plus endurant ou le plus rapide sur des courtes distances, mais en revanche, il est très fort au niveau des bras, il est aussi très puissant tant au niveau des jambes que des bras, et il tire beaucoup plus rapidement que des joueurs amateurs (ce qui lui permet de prendre de vitesse plus facilement son adversaire direct et de se mettre en situation de tir plus rapidement). De plus, pour l'entraîneur, la connaissance de ces paramètres, caractéristiques du handballeur élite offre un plus large panel des procédures de détection des talents, et permet d'étoffer et d'enrichir celles actuellement mises en place par la Fédération Française de Handball (FFHB). En effet, une étude de Dufour et Pontier (1989) a montré que la taille était une mesure spécifique du niveau de jeu, à savoir que les joueurs experts étaient plus grands que les joueurs de niveaux inférieurs. Cette étude confirme le choix de la FFHB qui considère la taille comme un critère important de sélection. Toutefois, d'après l'étude de Gorostiaga et coll. (2004), elle n'apparaît pas significativement différente entre élites et amateurs. Il est cependant à noter que les joueurs des deux équipes se situent en moyenne entre 183 et 187 cm, ce qui signifie qu'une taille élevée reste néanmoins une caractéristique des handballeurs de haut niveau.

En conclusion, les déterminants physiologiques et anthropométriques de la performance en handball invitent les entraîneurs à penser et à mettre en place des procédures innovantes d'évaluation et de détection, pour enrichir ce qui est actuellement réalisé dans ces domaines et optimiser leur programmation de l'entraînement.

En entraînement sportif de haut niveau, et notamment dans le cadre des procédures de sélection et de détection, l'importance primordiale accordée à certains paramètres semble à reconsidérer, et il apparaît selon cette étude, que grâce à l'établissement d'un « profil type » du handballeur élite, il soit possible d'orienter l'entraînement de joueurs de plus faibles niveaux dans le but de progresser vers ce profil élite, et de mettre en place des tests spécifiques en vue de la détection et de l'évaluation. Ces tests viseraient donc à évaluer les paramètres pertinents qui caractérisent l'expertise en handball, c’est-à-dire notamment la force du membre supérieur et la puissance des membres inférieurs et supérieurs. Dans cette perspective, il est possible d'évaluer la puissance musculaire des membres inférieurs avec par exemple le « Counter Movement Jump » (cf. Bosco & Komi 1979). En ce qui concerne la puissance et la force maximale du membre supérieur, on peut recourir à des tests de musculation ou des tests sur ergocycle à bras, dont un des plus faciles à mettre en œuvre est le test « force-vitesse » (cf. Vanderwalle et al., 1983). Les résultats obtenus lors de ces tests (Counter Movement Jump et force-vitesse) pourront ensuite être comparés à ceux d'une population typique de handballeurs élites (cf. figure 1 : https://notyss.com/savoirsport/downloadfile?id=271&fichier=S452_figure1.doc ), d'une part, pour identifier les qualités physiques à développer et travailler, et d'autre part, pour objectiver les évolutions induites par l'entraînement et éventuellement le réorienter si la courbe du joueur considéré ne tend pas vers celle de la population élite. Par ailleurs, l'évolution actuelle du jeu en handball se caractérise en grande partie par des vitesses de tir de plus en plus importantes. L'étude de Gorostiaga et coll. (2004) a en effet montré que les handballeurs élites avaient une vitesse de tir plus grande que les handballeurs amateurs. Mais il faut cependant rappeler que l'objectif premier en handball est d'être efficient lors du tir. Ainsi, l'évaluation de la vitesse de tir doit être associée à des exigences de précision. En effet, la combinaison entre la vitesse de la balle et la précision du tir est un facteur fondamental de la performance en handball. On pourrait donc mettre en place des tests qui mesureraient à la fois la vitesse d'exécution et la précision du tir. Par exemple, mesurer (avec des cellules photo-électriques) la vitesse des joueurs sur leurs trois derniers appuis avant le tir en fixant des impératifs de précision (plots dans les lucarnes, cibles à atteindre, pourcentages de réussite, etc.).