S463 - Les répétitions forcées n'améliorent pas le développement de la force musculaire lors d'entraînements en résistance
Le développement de la force maximale fait l’objet de plusieurs recherches visant à améliorer la performance sportive. Les athlètes et entraîneurs sont continuellement à l’affût de méthodes efficaces pour optimiser leurs entraînements.
On sait déjà que l’entraînement jusqu’à épuisement permet une plus grande amélioration de la force maximale en comparaison avec un entraînement où la répétition maximale n’est pas atteinte. Beaucoup de sportifs ont même adopté la pratique d’entraînement par répétitions forcées comme méthode de travail ; cette méthode par répétitions forcées permet d’aller au-delà de la répétition maximale grâce à un partenaire qui permet de compléter des répétitions additionnelles et augmenter les stimuli au maximum. Tout comme la méthode d’entraînement, les variables telles que le volume et l’intensité jouent un rôle clé dans le développement de la force. On entend souvent dire qu’il faut aller outre ses capacités afin de maximiser les bénéfices. Cependant, l’effet contraire se produit si le volume excède la quantité tolérable par le sujet; ce dernier risque plutôt une blessure.
Malgré le fait que la pratique de répétitions forcées soit couramment employée en musculation, très peu de données appuient de réels bénéfices. Seul un petit nombre de recherches scientifiques pertinentes ont étudié précisément les effets d’une telle pratique d’entraînement.
La présente recherche a donc pour but de déterminer si un entraînement avec un grand nombre de répétitions forcées apporte des gains substantiels à un entraînement comprenant moins de répétitions forcées. Elle vise aussi à définir si les variations de volumes de travail affectent l’amplitude des améliorations.
Douze joueurs de basketball et dix joueurs de volleyball se sont entraînés trois fois par semaine pendant six semaines. Trois groupes ont effectué respectivement 4 x 6, 8 x 3, 12 x 3 (séries x répétitions) de développé au banc. Les groupes 4 x 6 et 8 x 3 se sont vu attribués le même volume de travail tandis que celui du groupe 12 x 3 était plus élevé. Puisque le groupe 4 x 6 avait davantage de répétitions par série, cela a fait en sorte qu’il était contraint d’effectuer plus de répétitions forcées que les deux autres groupes. Par la suite, les évaluations étaient mesurées en fonction du 3-RM, du 6-RM et d’un test de puissance sur appareil assisté (Smith Machine bench press throw).
Pour tous les groupes, les performances du 6-RM sont passées de 75,9 kg à 80,6 kg tandis que celles du 3-RM ont grimpé de 81,5 kg à 86,0 kg. Pour ce qui est du « Smith Machine bench press throw », les performances sont passées de 589w à 646w. La puissance moyenne, quant à elle, est passée de 323w à 346w. On ne dénote aucune différence significative entre les groupes.
Malgré les différences entre le nombre de répétitions forcées pour un volume constant, aucune différence dans l’amplitude des gains de force et de puissance n’a été identifiée. Cela indique que l’augmentation du nombre de répétitions forcées n’améliore aucunement ni la force ni la puissance pour un même volume de travail. En présence d’un volume de travail plus élevé combiné à plus de répétitions forcées, aucune amélioration subséquente de la force ou de la puissance n’a été observée en comparaison avec un volume plus petit. Le volume n’est donc pas la variable en cause.
Les résultats de la présente recherche indiquent donc qu’il n’y a aucun bénéfice complémentaire à la pratique de répétitions forcées - dans le but d’un développement de la force, de la puissance et de l’hypertrophie - en comparaison avec un entraînement jusqu’à répétition maximale.
Même si l’entraînement jusqu’à épuisement fait partie intégrée d’un programme de développement de la force, cet aspect ne devrait pas être maintenu tout au long de l’année; une périodisation adéquate serait plus avantageuse. Sans quoi, signes et symptômes du surentraînement risquent d’apparaître et nuire à la performance et à la santé de l’athlète. S’entêter à travailler en répétitions forcées disposerait encore plus aux blessures physiques et aux dérèglements psychologiques de type « burn-out » en raison d’un volume d’entraînement d’autant plus élevé. En minimisant les répétitions forcées, l’entraîneur s’assurerait d’une meilleure gestion de la charge de travail et limiterait le stress imposé à l’athlète. De cette façon, l’athlète bénéficierait de plus de temps pour peaufiner d’autres qualités musculaires plutôt que de dépenser son énergie sur des efforts peu rentables. Il convient toutefois de noter que cette recherche a porté sur les effets des répétitions forcées sur la force et la puissance. D'autre part, des effets positifs sur l'endurance musculaire sont envisageables mais cette qualité n'a pas été mesurée.
Les participants de la présente étude étaient peu familiers à l’entraînement en résistance. De plus, leurs sports respectifs – volleyball et basketball – ne sont pas basés sur des épreuves de force maximale et les athlètes ne sont pas évalués selon ces critères. Par conséquent, des athlètes pratiquant l’haltérophilie et le « power lifting » devraient être prudents quant à l’application pratique de ces données scientifiques parce que leurs besoins en entraînement diffèrent de ceux des sujets étudiés.
Drinkwater EJ., Lawton TW. et coll. Increased number of forced repetitions does not enhance strength development with resistance training. Journal of Strength and Conditioning Research. 2007; 21(3): 841-847.
http://nsca.allenpress.com/nscaonline/?request=get-document&doi=10.1519%2FR-20666.1
Rédacteur
Patricia Houde, Mireille Godbout
étudiante 1er cycle en kinésiologie, Université de Montréal
Éditeur
Luc Léger
Ph. D., Professeur au Département de kinésiologie, Université de Montréal
Mots-clés
Développé au banc, répétitions maximales, répétitions forcées, musculation
Lectures suggérées
Drinkwater EJ., Lawton TW. et coll. Training leading to repetition failure enhances bench press strength gains in elite junior athletes. J. Strength Cond. Res. 2002; 9: 382–388.
Izquierdo M., Ibanez J. et coll. Differential effects of strength training leading to failure versus not to failure on hormonal responses, strength and muscle power gains. J. Appl. Physiol. 2006; 100: 1647–1656.
Stone, M., Chandler T. et coll. Training to muscular failure: Is it necessary? Strength. Cond. Coach. 1996; 18: 44–48.