S600 - Une situation de match de handball aménagée en 4 contre 4 engendre de plus grandes sollicitations cardio-respiratoires qu'un exercice de course
Quand bien même les habiletés techniques, les caractéristiques anthropométriques et les qualités de force et de puissance musculaires sont des déterminants essentiels de la performance en handball, l’importance des qualités aérobies ne doit pas être négligée. Lors d’un match, le joueur de handball parcourt en effet entre 4 et 6 km à une intensité proche de 80-90 % de sa FCmax
Pour accroître la condition aérobie, il a été montré qu’un entraînement proche de VO2max est nécessaire chez des sportifs entraînés. Les études démontrent que le joueur doit dépasser 90 % de VO2peak pendant au moins trois minutes. Néanmoins, courir n’est bien souvent pas l’activité favorite des handballeurs et, parce que maintenir les habiletés motrices spécifiques de l’activité est essentiel, le recours à des séances d’entraînement spécifiques a peu à peu vu le jour. L’impact physiologique de ces séances de préparation physique reste cependant encore à démontrer.
L’objectif de cette étude était ainsi d’évaluer si une situation de jeu à effectif réduit en 4 contre 4 est une alternative appropriée à l’entraînement intermittent classique en course en vue d’une sollicitation intense du système aérobie, dans la perspective d’une amélioration des capacités d’endurance.
MÉTHODES
Neuf joueurs de niveau national (21 ± 1,5 ans ; 181 ± 3 cm ; 78 ± 6 kg ; 5 ± 1 h d’entraînement hebdomadaire) ont participé à l’étude.?Les joueurs ont réalisé un test-navette intermittent (30-15), un exercice intermittent classique de course (8 minutes de 15 secondes de course réalisée à 95 % de la vitesse maximale déterminée lors du test 30/15, soit environ 120 % de vVO2max alternées avec 15 secondes de récupération, EI) et la situation de jeu à effectif réduit en 4 contre 4 (sans compter le gardien) ici testée (HB). Ces tests étaient séparés par au moins 48 heures de repos. Lors du match à effectif réduit, le jeu s’organisait durant 2 périodes de 225 secondes (soit 3 min 15), séparées par 30 secondes de récupération passive. Les règles du jeu étaient simplifiées pour éviter les interruptions de jeu et accroître la charge de l’exercice. Le dribble et les contacts en défense étaient interdits et les petites fautes non sanctionnées (reprise de dribble, marcher). Le réengagement était directement réalisé depuis le gardien de but à partir de la ligne des 6 m et le ballon remis immédiatement en jeu après toute sortie. Enfin, pour qu’un but soit valide, tous les joueurs de l’équipe attaquante étaient obligés d’être présents dans le camp adverse. Les joueurs étaient encouragés par le coach, de sorte qu’ils donnent leur maximum dans toutes les situations.
Durant les situations de course intermittente ou de jeu, les joueurs étaient tous équipés d’un analyseur de gaz portable (Cosmed K4b²). De plus, leur distance parcourue était a posteriori mesurée par un système d’analyse vidéo. Trois minutes après chaque situation, la lactatémie était mesurée. Enfin, la contribution énergétique de chaque exercice ainsi que la contribution aérobie/anaérobie étaient calculées a posteriori par la consommation d’oxygène ainsi que les équivalents en oxygène de la phosphocréatine et du lactate.
RÉSULTATS
La situation de jeu en effectif réduit (HB) s’est accompagnée de l’atteinte d’un plus haut pourcentage moyen de VO2max que la situation de course intermittente classique (EI, 106 % VO2max vs 99 % VO2max). En revanche, aucune différence sur la FC moyenne n’a été constatée entre les deux situations.
De plus, le temps passé au-dessus de 90 % de VO2max était plus long pour HB que EI (336 ± 93 s vs 215 ± 83 s) soit 70 ± 19 % contre 45 ± 17 % du temps d’exercice au-dessus de 90 % VO2max dans les deux situations, respectivement (cf. Fig. 1 : https://notyss.com/savoirsport/downloadfile?id=181&fichier=S600_figure1.doc ).
La contribution anaérobie s’est avérée plus importante lors de EI que HB (8.9 vs. 11.6 mmol.L-1) mais la dépense énergétique totale était similaire pour les deux situations comparées. Enfin, le pourcentage de VO2max soutenu durant HB et le pourcentage temps d’exercice au-dessus de 90 % VO2max étaient inversement corrélés à VO2max.
CONCLUSION
Cette étude démontre qu’une situation de jeu à effectif réduit avec des règles aménagées permet de solliciter suffisamment le système aérobie dans la perspective d’une amélioration de VO2max. Ce type de séance est apparu moins stressant sur le plan de sollicitation anaérobie et pourrait ainsi être plus facilement supporté par les joueurs, en plus du caractère attrayant qu’elle véhicule par rapport aux séances de course intermittente classique. De surcroît, une étude récente (Buchheit et coll., 2009) démontre que ce type d’entraînement mené deux fois par semaine durant dix semaines s’accompagne d’une amélioration significative de la capacité à répéter des sprints ainsi que de la vitesse maximale atteinte lors du test intermittent 30-15 (Buchheit, 2008).
Implications pratiques :
• Le jeu en 4 contre 4 en avec un règlement aménagé peut être utilisé comme une alternative à la course intermittente classique en vue d’une amélioration des qualités aérobies des joueurs de handball.
• Les coachs auraient intérêt à ajouter des règles spécifiques pour rendre la tâche plus contraignante pour les joueurs disposant des meilleures qualités aérobies.
• Comparé à un exercice de course intermittente classique, le jeu en effectif réduit avec règlement aménagé est associé à une moindre contribution anaérobie, ce qui encourage son utilisation lors des périodes de compétition.
• Cette étude démontre enfin que la FC est un indicateur peu fiable pour apprécier la contribution aérobie lors d’un match de handball.
Source primaire
Buchheit M, Lepretre PM, Behaegel AL, Millet GP, Cuvelier G, Ahmaidi S. Cardiorespiratory responses during running and sport-specific exercises in handball players. J Sci Med Sport 2009 May;12(3):399-405.
Rédacteur
Jean-Philippe Thomas
professeur d’éducation physique, entraîneur de handball BE2 et niveau 6 expert jeune et adulte, formateur à l’INSEP
Éditeur
Martin Buchheit
Mots-clés
handball, interval-training, VO2max
Lectures suggérées
Rannou F, Prioux J, Zouhal H et al. Physiological profile of handball players. J Sports Med Phys Fitness 2001;41(3):349-53.
Buchheit M. The 30—15 Intermittent Fitness Test: accuracy for individualizing interval training of young intermittent sport players. J Strength Cond Res 2008;22(2):365-74.
Buchheit M, Laursen PB, Kuhnle J, Ruch D, Renaud C, Ahmaidi S. Game-based training in young elite handball players. Int J Sports Med 2009 Apr;30(4):251-8.
Midgley AW, Mc Naughton LR. Time at or near VO2max during continuous and intermittent running. A review with special reference to considerations for the optimization of training protocols to elicit the longest time at or near VO2max. J Sports Med Phys Fitness 2006;46(1):1-14.